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Après Instant Articles de Facebook, le format AMP de Google vise à accélérer le temps de chargement des pages sur mobile... et à s'approprier l'audience des médias.

Notre impatience sur internet va-t-elle conduire les médias à devenir de simples pages sur les plateformes des GAFA? Avec les mêmes arguments que Facebook lors du lancement du format Instant Articles en mai dernier, Google a déployé officiellement le projet AMP (Accelerated Mobile Pages) le 24 février. Un outil censé accélérer l’affichage des articles sur mobile, avec un chargement quasi instantané. «Chaque fois que l’article met longtemps à se charger, l'éditeur risque de perdre des lecteurs. Les AMP sont des pages moins lourdes», vantait Sundar Pichai, président-directeur général de Google, à Sciences Po Paris le jour même. Un atout de taille pour les éditeurs partenaires, car les articles présentant le petit éclair vert sont référencés tout en haut de la page d'accueil du moteur de recherche.

Perte d'audience

Ces nouveaux supports de diffusion, qui prônent l’expérience utilisateur, peuvent cependant représenter un danger pour les éditeurs en termes de trafic vers leur propre site. «C’est évidemment un gros dilemme…», reconnaît Guillaume Bournizien, digital marketing manager du Parisien, parmi les premiers partenaires d'AMP comme d'Instant Articles. «Sachant que 20 à 25% du trafic vers leparisien.fr vient de Facebook, et que près de la moitié ont été mis sur Instant Articles, nous avons en effet essuyé une perte d’audience significative. Mais, les internautes y passent beaucoup plus de temps et sont de plus en plus fidèles. La stratégie du Parisien c’est d’être là où sont ses lecteurs.»

Pour l’heure, treize éditeurs français ont signé avec Google (France Télévisions, My TF1, Ouest France, RTL…). A noter l’absence de grands quotidiens comme Le Monde ou Le Figaro. «Il n’y a pas d’urgence pour nous, soutient Pascal Pouquet, directeur des nouveaux médias du Figaro. Nous testons le format avec certains sites de CCM Benchmark. Notre objectif est d’arriver à optimiser la monétisation, notamment avec la possibilité de mettre des cookies et de maîtriser la data. Le système actuel est insuffisant.»

Comme pour Instant Articles, l’éditeur, via ses propres ad-server, perçoit 100% des revenus. Mais comme Facebook, Google veut limiter l’affichage publicitaire. Les interstitiels sont refusés et seuls les formats classiques sont acceptés. Un système de recommandation de contenus est possible et AMP est compatible avec les paywalls et abonnements pour permettre à des utilisateurs anonymes de consulter gratuitement une partie des contenus.

Content centric

Le 18 février, lors du comité Médiamétrie, la décision a été prise de ne pas comptabiliser ces nouveaux supports de diffusion dans l'audience internet des médias. Un groupe de travail a néanmoins été constitué pour réfléchir à cette prise en compte. «Jusqu’à présent, Mediamétrie mesure l’audience des supports (support centric). Mais nous pourrions passer à une mesure centrée sur le contenu (content centric) et déportalisée», rapporte Estelle Duval, directrice du département Internet de Médiamétrie. «La volonté des GAFA de constituer des écosystèmes propriétaires et fermés où ils maîtrisent l’accès à la data ne sont pas sans risque, prévient Pascal Pouquet. Les médias dépendent de ces plateformes qui peuvent à tout moment changer les règles du jeu. Il faut se battre pour ne pas devenir demain de simples fournisseurs de contenus pour les plateformes.»

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