Communication de crise
Alors que l'enseigne e.Leclerc a reconnu dès mardi avoir vendu des produits contaminés Lactalis malgré leur rappel, Auchan, Système U ou Carrefour ont eux aussi admis cette défaillance. Marie Muzard, directrice de Marie Muzard Conseil, analyse la communication de crise des enseignes.

L’affaire Lactalis ne retombe pas et les grandes enseignes de distribution sont dans le viseur. Entre mardi 9 et mercredi 10 janvier 2018, e.Leclerc, Carrefour, Système U, Auchan ou Cora ont reconnu avoir vendu des produits contaminés. Marie Muzard, directrice de Marie Muzard Conseil (MMC), revient en quatre points sur la communication des grandes enseignes face à cette crise.

 

1- e.Leclerc a bien réagi

Pour Marie Muzard, le premier distributeur français a « plutôt bien réagi ». « e.Leclerc a été le premier concerné par l’affaire Lactalis. L'enseigne n’a pas eu le choix. Elle devait réagir vite et fort. Et ses dirigeants l'ont plutôt bien fait, avec deux priorités claires : l’identification et l’alerte des clients concernés », explique-t-elle. Point très important également pour Marie Muzard, la prise de parole de Michel-Edouard Leclerc reconnaissant une « défaillance humaine ». « Leclerc assume clairement ses responsabilités », continue l’experte en communication de crise. Elle juge toutefois sa déclaration « subtile »: « Sans attaquer frontalement Lactalis, Michel-Edouard Leclerc a reconnu le caractère exceptionnel du dysfonctionnement avec un rappel des produits en trois temps. Il faut dire que cela s’est fait dans un contexte particulier, celui de Noël, et alors qu’il y avait une promotion sur les produits Lactalis », ajoute la fondatrice de MMC.

 

2- Une communication peu humaine des autres enseignes

Concernant les autres enseignes de grande distribution, Marie Muzard a un avis plus mitigé. « Dès que e.Leclerc a annoncé avoir vendu des lots contaminés, les autres distributeurs ont annoncé qu'ils allaient vérifier leurs stocks. C’est plutôt bien joué. Une absence de réaction aurait été considérée comme inconsciente par l’opinion », note-t-elle. Cependant, les enseignes comme Auchan, Carrefour ou Système U ne se sont pas montrées à la hauteur par la suite pour Marie Muzard. « Leurs communications ont été trop brèves, pas assez humaines et leurs prises de paroles étaient divergentes. Ainsi Intermarché a attaqué frontalement Lactalis. Ce n’est pas très habile. Il donne l’impression de fuir ses responsabilités ».

 

3- Boycott évité pour e.Leclerc

Cela peut paraître étrange mais e.Leclerc semble avoir adopté la meilleure stratégie de communication. Marie Muzard avance plusieurs arguments : «Le fait que toutes les enseignes soient touchées a évité une crise de défiance vis à vis de e.Leclerc. Si une seule enseigne avait été concernée, elle aurait pu être boycottée. Si e.Leclerc a été beaucoup cité, sa réponse a été de qualité. Les autres distributeurs ont plutôt cherché à contre-attaquer de manière plus ou moins subtile. Ils n’ont pas assumé réellement leur erreur. C’est pourquoi les consommateurs pourraient être amenés à se poser des questions sur ces enseignes. L'intervention brutale d'Intermarché les expose davantage », juge Marie Muzard.

 

4- Une affaire à rebondissements

L’affaire Lactalis semble partie pour durer. Le Ministre de l’économie Bruno Le Maire a annoncé jeudi 11 janvier 2018 que « 91 établissements ont été identifiés pour avoir vendu des produits contaminés et qu’il y aurait 2500 nouveaux contrôles pour retirer tous les lots suspects ». Marie Muzard pense également que ce bad buzz autour de cette industrie agroalimentaire est loin d’être terminé. « Il va encore y avoir des rebondissements notamment avec les plaintes des familles. La DGCCRF (direction de la concurrence et de la répression des fraudes) devrait rendre prochainement ses conclusions en établissant les responsabilités de chacun. Il pourrait également y avoir une crise de confiance des consommateurs à l’égard des distributeurs », indique-t-elle. Face à cela, Marie Muzard préconise « une réponse collective à la fois de l’industrie agro-alimentaire, de la distribution et des autorités publiques ». De même, elle considère que les distributeurs ont intérêt à « dialoguer avec les familles des victimes dans la durée et pas seulement à s’excuser via un communiqué plutôt froid ». Intermarché, Carrefour, Auchan et autres sont prévenus…

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