Réseau social
Le groupe américain Microsoft vient de lancer Teams, à la fois système de messagerie instantanée et de collaboration. L'outil entend bouleverser le travail en équipe. Entretien avec Carole Benichou, directrice de la division Office Marketing de Microsoft France.

Les messageries instantanées ont envahi notre quotidien, y compris le monde professionnel. Le 3 novembre dernier, Microsoft présentait Teams, sa plateforme de communication collaborative, que l’on peut qualifier de «Slack-like». Mis à la disposition de toutes les entreprises depuis le 14 mars dernier, Microsoft a lancé officiellement l’outil (et son plan de communication) le 20 avril lors de son événement «The Art of Teams», centré sur le thème du travail en équipe. Et déjà, plus de 50 000 sociétés dans le monde l'ont testé, dont près de 70% du CAC 40 selon Microsoft.

Créée en 2011, la suite de logiciels de bureautique Office 365 promettait de devenir une «digital workplace», c’est-à-dire une plateforme complète et cohérente qui intégrerait toutes les technologies de communication en entreprise (e-mail, messagerie instantanée, médias sociaux, applications RH, outils de réunions virtuelles…). Le géant américain semble en bonne voie de réussir son pari.

Le marché des réseaux sociaux d'entreprise est déjà très embouteillé: Teams n'est-il pas l'acteur de trop?

Carole Bénichou. Non, car Teams répond à une vraie attente exprimée par nos clients. Celle d’avoir enfin un outil de chat pour un travail collaboratif. L’avantage principal de Teams est d’être complètement intégré à Office et donc de regrouper toutes les fonctionnalités dont les professionnels ont besoin au même endroit. Conçu comme un outil grand public, il s’agit désormais d’un des canaux conversationnels de la suite, au même titre que l’e-mail, Skype ou Yammer. Objectif: permettre à plusieurs personnes de travailler ensemble en direct sur les même documents (Word, Excel ou Power Point), de mener des téléconférences via Skype, de programmer des événements sur un calendrier partagé, etc. L'interface peut être personnalisée pour ajouter des raccourcis vers des documents et des services en ligne utilisés fréquemment ou intégrer des services conçus par des tiers: plus de 150 applications sont disponibles, à l’instar de Trello, Hootsuite ou encore Asana… Et nous allons continuer à en intégrer de nouvelles et à développer les API.

L'objectif est-il de faire de Teams la porte d’entrée d'Office?

C.B. Microsoft se positionne dans une stratégie de complémentarité. L’objectif n’est pas de mettre fin à l’e-mail. En fonction du projet, des messages, des audiences ou de la temporalité, le collaborateur ne choisira pas le même canal. Par exemple, Yammer est sur une temporalité plus longue et une audience plus large ; on y échangera plutôt des documents de référence et de long terme. Sur Teams, les groupes seront plus restreints et le contexte plus éphémère, le temps d’un projet commun. C’est un outil en forme de hub.

Y aura t-il des synergies avec Linkedin, propriété de Microsoft depuis décembre 2016?

C. B. Ce que je peux dire pour l’instant, c’est que les équipes d’Office et celles de Linkedin ont déjà commencé à se rapprocher pour travailler des scénarios d’intégration. On pourrait très bien envisager par exemple d’utiliser les profils Linkedin pour compléter les comptes sur les autres canaux… C’est une piste, même si nous n’avons pas encore d’annonces à faire à ce sujet.

Quelles sont les pistes d’évolution de Teams?

C.B. Son adoption est encore relativement récente. Nous sommes dans la phase de présentation de l’outil et d’accompagnement de nos clients. Le vrai challenge pour Microsoft, c’est la transformation des usages à l’intérieur des entreprises. Plus d’une centaine de fonctionnalités ont été ajoutées entre la version bêta et le lancement officiel, comme la possibilité de choisir entre groupes privés et publics. D’ici juin 2017, nous allons lancer une fonctionnalité importante qui permettra d’ouvrir des discussions avec des contacts externes. Par exemple, une agence de pub pourra inviter des membres d’une entreprise cliente pour travailler ensemble sur un même projet, et ainsi, faciliter une communication en temps réel.

Quelles sont les tendances du secteur des réseaux sociaux d’entreprise (RSE)?

C.B. Le marché des RSE est le juste reflet du marché des réseaux sociaux dans la sphère privée. Le consommateur dispose d’une large panoplie de technologies pour entrer en communication: le mail, le SMS, la messagerie, la vidéo, le son, etc. Et utilise de nombreux et divers services. Mais dans l’entreprise, la problématique des silos va forcément se poser un jour. Les RSE du futur doivent se muer en plateformes globales et intégrées. Aussi, les systèmes intelligents vont se développer de plus en plus, pour notamment limiter le temps perdu à rechercher des informations à travers tous les canaux utilisés. La recherche d’information pertinente aujourd’hui est certainement la tâche qui prend le plus de temps et qui a le plus d'impact sur la productivité.

Avis d’expert

 «Surtout, ne jamais imposer un outil»

Bastien Le Lann, responsable du pôle Analyse et Création chez Lecko

Quel est votre vision du marché des RSE?

Bastien Le Lann. De Workplace de Facebook, lancé début octobre, à G Suite du dominant Google, en passant par Slack, les outils collaboratifs en entreprise ont le vent en poupe. C’est un marché foisonnant au sein duquel des bulles commencent à se créer avec une concentration en cours: Microsoft a rachété Linkedin, l’australien Atlassian a acquis Trello, etc. Mais si les géants ont une influence certaine, on a tout de même en France la chance d’avoir des acteurs alternatifs très actifs: Talk Spirit, Jamespot, Whaller… Toutes ces applications ont une valeur à proposer.

Parmi toutes ces offres, comment les managers peuvent-ils s'y retrouver ?

B.L.L. Avant de choisir une plateforme pour ses équipes, le manager devra s’assurer de déjà connaître lui-même l’outil. La première question à se poser c’est: «quel outil pour quel usage?» ou «quel est le changement que je veux impulser?». Fluidifier le partage d’infos? Développer le travail en groupe? Améliorer la communication entre les services? Ensuite, il faut tester et faire tester. Surtout, ne jamais imposer un outil, mais au contraire encourager la prise d’initiatives. Cela implique de donner du pouvoir aux collaborateurs… C’est d’ailleurs la clé d’une bonne transformation.

 

L'Occitane teste et approuve 

«Le groupe L’Occitane, éclaté géographiquement, souhaitait simplifier et favoriser la communication ainsi que le partage d’informations et de documents entres les différentes équipes, indique Alexia Schmitt, IT Director chez L’Occitane. C’est la raison pour laquelle nous avons adopté Teams. L'outil a considérablement simplifié les échanges ainsi le que partage d'informations. Il offre de nouvelles possibilités en termes de travail collaboratif à différentes échelles (projet, service, département…), et permet en outre une réelle intégration de nos outils tiers au sein d'une même interface.»

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