Une affiche réussie, c'est un uppercut. Dans la communication extérieure, on a coutume de le dire: «Nous disposons de huit secondes pour séduire», observe Isabelle Schlumberger, directrice générale commerce et développement de JCDecaux. «Dans notre média, si la création n'est pas au rendez-vous, il n'est pas possible de se rattraper sur l'éditorial...»
L'afficheur vient de recruter un directeur de la création et des contenus, une nouveauté dans la communication extérieure. «Nous avons besoin de créatifs qui réfléchissent au prolongement de concepts imaginés par les agences, explique Isabelle Schlumberger. Il s'agit également d'être force de proposition sur des formats comme les panneaux numériques dans les aéroports, par exemple».
Le nouveau directeur de création de JCDecaux, Damien Melich, provient de l'agence Being (groupe TBWA), dont il était le directeur de la création digitale. «J'avais envie de sortir du cadre de l'écran d'ordinateur et du smartphone pour explorer un plus grand terrain de jeu», explique-t-il.
Tashi Barusha, directeur de la création de Clear Channel, a emprunté le même chemin que son homologue de JCDecaux en octobre 2011. Une évidence pour le créatif, ancien art supervisor de DDB, féru de «street art» (art urbain). «L'affiche est la forme la plus pure et la plus noble de l'exercice publicitaire», estime Tahsi Barusha. Le créatif a créé un studio de création, composé de trois «motion designers», d'un directeur artistique et d'une responsable du trafic. «Cette ouverture à la création émane des dirigeants du groupe, William Eccleshare, PDG de Clear Channel International, qui vient de la publicité [il a officié trente ans en agence, notamment en tant que président Europe de Young & Rubicam et de BBDO], et Bob Pittman, PDG de Clear Channel Media Holdings, fondateur de MTV», souligne Tashi Barusha.
Le directeur de création de Clear Channel évoque ses premiers pas dans l'affichage comme la découverte d'une terre étrangère. «Lorsque j'étais chez DDB, je pensais qu'on travaillait tous dans la même famille», se souvient Tashi Barusha. En réalité, le choc culturel est énorme : l'affichage est un monde très industriel, très terrien». Pour autant, comme le raconte Damihen Melich, «à l'agence, lorsque j'ai annoncé mon départ pour JCDecaux, les réactions étaient extrêmement positives».
Dès son arrivée, Tashi Barusha a, quant à lui, été plongé dans le grand bain, en assistant au Grand Prix de l'affichage, qui se tenait à Berlin. Il se souvient des débats qui alimentèrent alors les délibérations : «Il a beaucoup été question du besoin de passerelles entre affichage et publicité», rappelle-t-il. Andrea Stillacci, cofondateur d'Herezie, y avait notamment déploré «un manque d'innovation dû au fait que les régies médias, les agences de publicité et les afficheurs continuent à fonctionner en silos...», tandis que Gérard Unger, PDG de Mediatransports, remarquait que «les créatifs ne savent pas encore utiliser tous les apports du numérique».
Ces nouveaux arrivés dans l'affichage permettront-ils de jeter des ponts entre ces différents métiers? Isabelle Schlumberger en est certaine: «Les directeurs de création constituent un nouveau point d'entrée pour les agences et les clients, à un moment où le développement de la digitalisation et de la connectivité des panneaux ouvre plus que jamais le champ des possibles.»
(encadré)
JCDecaux annonce une «année record» en 2011
Avec un chiffre d'affaires de 2,46 milliards d'euros (+4,8%), JCDecaux a présenté le 8 mars des résultats 2011 records, selon Jean-Charles Decaux, son président du directoire: un résultat net part du groupe de 212,6 millions d'euros (+22,7%), un résultat d'exploitation de 327 millions d'euros (+17,2%) et une marge opérationnelle de 582,1 millions d'euros, «la plus élevée de l'histoire du groupe».