Ad-exchange
Les métiers du «real time bidding» sont en constant renouvellement, mais la transparence n’est pas toujours au rendez-vous, notamment pour la rémunération de ces nombreux intermédiaires.

La vente aux enchères et en temps réel («real time bidding» ou RTB) fonctionne sur le même modèle qu'un marché financier. D'un côté, des acheteurs – les annonceurs – sont à la recherche d'espaces publicitaires où diffuser leur publicité, avec des objectifs de performance ou d'image auprès de certaines cibles. De l'autre, des offreurs – les éditeurs de sites – mettent en vente leur espace publicitaire impression par impression: chaque fois qu'un internaute ouvre une page, il crée un espace publicitaire.Chaque impression publicitaire est définie par son emplacement dans la page, son «contexte» et la structure de son audience.

 

Acheteurs et offreurs se rencontrent sur une place de marché, l'ad-exchange. Chaque transaction est remportée par l'annonceur le plus offrant, si toutefois elle n'entre pas en contradiction avec les publicités acceptées par l'éditeur. Comme à la Bourse, le tout est automatisé et se produit en quelques millièmes de secondes. Mais à l'inverse de ce qui se pratique dans les milieux financiers, les intermédiaires et acteurs de ces places de marché sont extrêmement récents, tout comme leurs métiers qui se réinventent constamment. Glossaire.

 

Le SSP, premier intermédiaire

 

Le SSP («Supply Side Platform») est le premier intermédiaire du côté des éditeurs. En contact en général avec le directeur commercial de la régie, le SSP met à disposition de l'éditeur une interface où celui-ci peut constater en direct les campagnes et les prix en cours sur son site, définir ses prix planchers et ses exigences en matière d'annonces. Le site de l'Olympique de Marseille pourra, par exemple, exclure les annonceurs concurrents de ses sponsors ou certains secteurs d'activité, comme les boissons alcoolisées. «C'est comme construire sa piscine en fonction de son inventaire plutôt que de le diluer dans l'océan d'annonceurs disponibles», explique Hervé Brunet, CEO de Sticky Ads TV, un SSP spécialisé dans la vidéo. L'océan, c'est tous les ad-exchanges connectées au SSP, qui elles-mêmes regroupent des annonceurs.

 

Dossier: Ad-exchange, la révolution programmatique

 

Le SSP s'occupe aussi de former tout ou partie des équipes commerciales des éditeurs au RTB et ont un rôle de conseil. «En général, on laisse d'abord l'annonceur formuler ses exigences, fixer son prix plancher selon celui de sa régie. Au bout d'un ou deux mois, on voit le résultat et on propose des idées d'amélioration», explique Antoine Beaucamp, demand operation manager chez Sticky Ads. Le SSP se rémunère en prenant, en général, une commission de 15% sur les revenus générés. «Pas question d'être à la fois juge et arbitre», selon les mots d'Hervé Brunet.

 

Mais il n'est pas rare que des opérateurs servent à la fois l'annonceur et l'éditeur. Certains SSP, comme App Nexus, sont aussi des DSP («Demand Side Platform»). C'est l'équivalent des SSP, mais du côté des annonceurs. Ils leur fournissent une technologie et des conseils pour optimiser leur campagne et sont également connectées aux ad-exchanges, point de rencontre avec les éditeurs.

 

Plateformes d'achat programmatique

 

Entre le client final et le DSP se glissent aussi les trading desks, équivalent des agences médias, mais échappant pour l'heure à la loi Sapin, et donc autorisés à acheter et vendre de l'espace publicitaire. Ils se rémunèrent grâce à la marge qu'ils réalisent entre l'achat et la vente d'un espace. Ainsi Trade Lab, société de 47 salariés spécialisée en très grande partie dans le display. «Nous  travaillons à 60% avec des agences et le restant en direct avec des annonceurs», explique son cofondateur Charles Gros. Côté médias, les trading desks – ou plateformes d'achat programmatique – sont assurées par La Place Media et Audience Square.

Le nerf de la guerre? La data.

 

C'est ce qui assurerait un meilleur ciblage et légitime les rémunérations. Elle peut provenir directement de l'annonceur, qui la recueille sur son site web ou grâce à ses dossiers clients, et est alors appelée la «First Party Data». Elle peut aussi être recueillie et commercialisée par les éditeurs, il s'agit alors de la «Second Party Data».

 

C'est par exemple ce qui fait le succès de Quantcast, société américaine employant 600 personnes dans le monde, et 11 en France où elle s'est installée en septembre 2013. Quantcast a une double casquette: d'un côté, elle propose aux éditeurs de mesurer gratuitement leur audience afin d'avoir une vision précise de leurs visiteurs. De l'autre, elle monétise ces datas via une activité de trading desk. «On opère des campagnes avec nos propres datas, on n'en n'achète pas», explique Frank Lewkowicz, directeur général de Quantcast France.

 

DMP, le spécialiste de la data

 

Enfin, la «Third Party Data» est fournie par la DMP («Data Management Platform»). «Nous avons une cinquantaine d'éditeurs partenaires, comme Le Monde, M6, Webedia ou encore Les Echos, sur lesquels nous récoltons de la donnée, anonymement, grâce aux cookies», explique Jean-Sébastien Suze, managing director d'Ezakus France, une DMP créée en août 2011. L'éditeur paie une licence annuelle à Ezakus pour mesurer précisément, et par segment, son audience et la commercialise. Ezakus prélève aussi un pourcentage au CPM (coût pour mille vues) sur les campagnes menées sur ses sites éditeurs partenaires, grâce à la data récoltée.

 

La DMP peut aussi relier la data des éditeurs partenaires et celles des annonceurs. «Si Volkswagen a identifié que ses acheteurs ont une affinité avec le voyage, je peux lui identifier une population qui ressemble à ses clients, selon leur navigation sur les sites éditeurs partenaires», détaille Jean-Sébastien Suze. Après le retargeting vient donc l'heure du «pré-targeting»: la recherche de profils «jumeaux» (ou «look alike», dans le jargon du RTB) aux clients d'une marque grâce aux données sur leur navigation.

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