Étude
KR Media (Group M) a réalisé une étude sur l'impact du digital dans le divertissement. Source de nombreux amusements, il modifie également la manière de vivre les distractions traditionnelles.

Est-ce que c’est parce qu’on tweete qu’on s’amuse, et est-ce parce qu’on s’amuse que l’on tweete? Cette interrogation qui a sa place au panthéon des questions sans réponses méritait bien une étude. C’est précisément sur le sujet du rapport entre divertissement et digital que l’agence média KR Media, accompagnée du Celsa Paris-Sorbonne, s'est penchée. «La société est extrêmement consommatrice de divertissements», explique Julien Féré, directeur des stratégies pour KR Media et directeur de l’étude. Mais difficile d’établir une définition nette du «divertissement», quand la notion rejoint à la fois la sociologie, la psychologie et… le marketing.

Pour bien commencer, l’équipe est partie d’une étude qualitative, sur un panel de dix personnes. «On souhaitait établir une “pratique” du divertissement obtenue en déclaratif, raconte Coline Juillerat, planneuse stratégique chez KR Media. Certaines facettes ne ressortent pas spontanément. Par exemple, un interviewé ne vous dira pas que son dîner en famille a été un divertissement en premier lieu, mais en dialoguant avec, il le devient ». Les répondants tenaient également un «carnet de bord» digital, dans lequel ils mentionnaient les aspects du divertissement dans leur journée. Il permettait une approche plus intime. S’en est suivi une étude quantitative sur le M panel –panel de Groupe M de 800 personnes– et une étude in vivo en partenariat avec Gameloft, afin de valider et surtout mesurer l’ampleur des phénomènes définis.

Routine vs plaisir

Car la première observation de l’étude est simple: le divertissement est pluriel. «Il rejoint directement la notion de plaisir, qu’il soit simple ou demande de l’engagement, explicite Hécate Vergopoulos, maître de conférence Celsa Paris-Sorbonne. Quand on leur parle de divertissement, les Français opposent deux mondes: le quotidien et le divertissement. La routine, versus le plaisir. Alors même que certaines activités de divertissement peuvent être réalisées de façon routinière, comme jouer sur son smartphone dans le métro.» Le divertissement n’est donc pas tant une activité qu’une émotion liée à une activité. D’où la difficulté du sujet.

Si le divertissement s’établit dans un rapport intime entre la personne et l’activité, il est aussi motivé par une construction sociale de son image. La première intervient sur la notion d’action elle-même. «L’étude met en avant le tabou de l’ennui, détaille Julien Féré. Dans une société de productivité, ne rien faire est un échec, un interdit. Le divertissement pris en tant qu’occupation témoigne de l’action permanente que l’on s’impose. Ne rien faire est mal vécu.» Agir c’est exister. «Ensuite, la nature de l’action vient classer notre appartenance à un groupe social, ajoute Hécate Vergopoulos. Selon l’identité qu’on veut se construire, on pratique certains divertissements plutôt que d'autres et on se raconte d’une certaine manière plutôt qu’une autre.» Certains Français regardent des débats politiques sur une chaîne étrangère comme divertissement. Pour d’autres, ce n’en serait jamais un. Mais le fait même de le faire, et de le revendiquer comme divertissement, les caractérise de suite dans la catégorie «intellectuel».

«Chacun de nos actes est ainsi motivé par la définition que nous nous représentons du bonheur», ponctue Coline Juillerat. Écouter de la musique, en amoureux, en faisant de la cuisine, est une idée du divertissement, qui définit un temps de bonheur à deux, dans le sens où il correspond à l’image d’Épinal que l’on se fait du couple.»

Mise en scène

Partant du bonheur, le divertissement tire son intensité de sa rareté. De moments simples de la vie de tous les jours, on passe à des expériences fortes et uniques. Bonheur quotidien ou shoot d’adrénaline, tout peut être divertissement. «Parler à des amis sur une application de messagerie a un indice de 7,3, quand voir des amis est noté à 8,1 en intensité», décrit Julien Féré. Le digital joue ici son rôle: multipliant les occasions, il fait proliférer les moments de divertissement –parler à un ami– tout en accentuant l’intensité plus rare –le rencontrer.

De manière plus large, «le digital accompagne toute la chaîne du divertissement et joue trois grands rôles, synthétise Julien Féré. Il permet de sociabiliser, en créant une connexion avec d’autres personnes qui partagent les mêmes intérêts, d’accompagner, soit en additionnant les activités [jouer à table] soit en évitant l’ennui à tout moment. Mais aussi de montrer l’exceptionnel. Le digital ouvre la voie du partage et de la mise en scène du divertissement, renforçant ainsi son identité. Il devient bien plus qu’un créateur d’activités divertissantes, il accélère et accompagne toutes les formes traditionnelles d'amusements.»  

À partir de cet insight formalisé, KR Media a créé plusieurs typologies de divertissement. Chacune répondant à une problématique allant de la socialisation au refus de l’ennui, en passant par aller mieux, se détendre, et le «multitasking». C’est dans ces typologies que les marques peuvent puiser des sources d’inspiration pour s'insérer dans la vie de leur consommateur... 

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