Gestion
Même omniprésent dans le quotidien des managers, le tableau de bord n’a rien d’une évidence. Pour disposer d'instruments efficaces, il est préférable de se poser les bonnes questions dans le bon ordre. Processus en quatre étapes avec le cabinet Nankita.

Outils de gestion établis à partir de l'activité et des résultats de l'entreprise, les tableaux de bord sont devenus incontournables dans la mesure où ils permettent un contrôle de la réalisation des objectifs fixés. S'ils sont bien faits, ils peuvent représenter pour le manager des instruments de mesure de la performance qui s'apparentent à une aide à la prise de risque par l'objectivation des critères d'appréciation. Avec moins d'incertitude sur la route à suivre, le cap est plus sûr! Mais le terme générique cache une réalité toujours singulière, selon Marie-Hélène Millie, fondatrice-dirigeante du cabinet Nankita et auteur de Comment construire des tableaux de bord vraiment utiles (éd. Gereso)... «Un tableau de bord est souvent corrélé à un projet particulier comme dynamiser une organisation, améliorer le dialogue de gestion, décrocher une certification ou améliorer la performance», résume-t-elle. Les quatres questions à se poser pour naviguer avec des instruments de bord fiables.

 

1 - Quels objectifs à atteindre?

La première question à se poser doit porter sur l'objectif à atteindre : un tableau de bord doit avoir un impact. Il faut donc se demander au préalable ce qu'il s’agit de modifier, quelle dynamique on veut mettre en place. Très concrètement, que veut-on améliorer ou faire évoluer? «Ce n’est qu'ensuite qu'il faut s’interroger sur les indicateurs qui doivent figurer dans le tableau de bord, souligne Marie-Hélène Millie. Mais là encore, cette réflexion doit prendre en compte la réalité de l’entreprise, son modèle économique et sa stratégie. C’est à cette condition qu’il sera possible de tracer une feuille de route cohérente pour chaque direction et de concevoir des tableaux de bord pertinents. »

Il faut aussi prendre en compte le modèle économique de l’entreprise et sa structure de management. « Un tableau de bord n’a d’intérêt que si ceux qui en sont responsables peuvent agir sur les leviers en lien direct avec les objectifs», rappelle Marie-Hélène Millie. Il faut donc savoir avec précision qui décide quoi dans une organisation pour savoir de quelle information il ou elle aura besoin.

 

2 - Quels indicateurs?

Un tableau de bord relatif aux ventes peut comporter trois types d'indicateurs. D'abord ceux relatifs aux résultats: volumes réalisés, chiffre d'affaires, marge. «Ils indiquent la destination à atteindre», résume Marie-Hélène Millie. Une seconde série d'indicateurs a pour but de cerner les moyens à mettre en œuvre; ce sont les variables d’action, les éléments sur lesquels vont pouvoir agir ceux à qui ont été confiés les objectifs. Cette seconde série d’indicateurs va porter sur la prospection, les rendez-vous pris, les actions engagées sur les réseaux sociaux, par exemple. «Il peut être très utile de disposer d'indicateurs sur les facteurs clefs de réussite, c’est-à-dire les paramètres sur lesquels la personne où l’équipe n’a pas de pouvoir direct mais qui vont impacter ses résultats», précise la consultante. C’est dans cette troisième série d'indicateurs que seront mentionnés les délais de livraison, le niveau de qualité des produits, la qualité de la relation client, par exemple. Ce type d’indicateurs n’est pas forcément produit par une seule source. Du fait de ses contacts avec les clients, un vendeur peut faire remonter des informations que le service marketing pourra utiliser pour préciser, par exemple, le niveau de qualité de la relation client.


3 - Quelle efficacité?

Un bon tableau de bord a un impact... positif. «Les personnes qui en ont la responsabilité deviennent plus autonomes, peuvent agir plus rapidement et de façon plus souple », note Marie-Hélène Millie. Un bon tableau de bord permet de sortir d’un système où il faut attendre la publication des résultats financiers pour découvrir un problème et concevoir des actions correctrices. Il favorise aussi le dialogue entre personnes ou entre équipes, comme l'a constaté cette spécialiste dans une entreprise du domaine logistique: «Chaque responsable de filiale (ou directeur de Business Unit) avait son tableau de bord et participait à des web conférences avec ses collègues situés dans d'autres filiales ayant des problématiques similaires. Cela leur a permis de prendre connaissance des initiatives des uns et des autres, de voir ce qui fonctionnait, ou pas.» Ces échanges mettent souvent fin à la relation « en étoile » entre la direction financière et les autres, qui aboutit souvent à un dialogue en mode «ping-pong».


4 - Quelles évolutions?

Un tableau de bord n'est pas une table inscrite dans le marbre. D'autant plus aujourd'hui dans un environnement très mouvant. Quelle entreprise peut dire qu'elle a une stratégie à cinq ans bien établie ? Tout tableau de bord est une vision limitée du réel. Les indicateurs sont comme des projecteurs. Ils ne montrent pas toute la réalité, mais doivent éclairer le chemin pour atteindre l'objectif, la destination. D'où l'importance de bien choisir les indicateurs, et de les orienter dans la bonne direction. «Être réactif et flexible est un impératif afin de pouvoir s’adapter à un environnement en constante évolution mais il faut aussi prendre les décisions à partir des informations les plus pertinentes, qui sont parfois difficiles à identifier.», constate Marie-Hélène Millie.

L'expérience Bloom at Work 

Un coordonnier est-il toujours le plus mal chaussé ? Bloom At Work a entrepris de démontrer le contraire. Ce fournisseur de solutions de mesure de l'engagement des collaborateurs est parti des insuffisances de son système antérieur: chaque équipe (ventes, marketing, gestion client et technique) remplissait son propre tableau de bord avec ses propres indicateurs. L’exercice était alors fastidieux et ne favorisait pas les échanges. «Nous avons décidé de créer un document unique, explique Charles de Fréminville, fondateur et dirigeant. À partir de quatre à cinq grands objectifs (chiffre d’affaires, marketing, etc), il comporte des KPI relativement semblables, que toutes les équipes complètent chaque mois.»
Basé sur la méthode OKR (Objectives and Key Results) qui permet de structurer les KPI autour d’objectifs, ce tableau comporte trois colonnes par KPI : N-1, N et l’objectif à atteindre. L’ensemble des KPI sont reportés sur une page au format A2 qui est affichée dans les locaux. « C’est important que tout le monde puisse le voir, précise le dirigeant. Cela alimente les échanges. » Et sans doute une émulation par le contrôle, un rien stressant, de ses pairs...
Chaque trimestre, un point formel permet d’interpréter l’évolution des KPI, de revoir les moyens à mettre en œuvre ou d'ajuster les objectifs en fonction des retours. « Il se peut qu’une fonctionnalité de notre produit suscite une adhésion particulièrement forte, auquel cas nous examinons ce facteur afin de voir si nous devons modifier notre stratégie et en conséquences les objectifs et les KPI », explique Charles de Fréminville. Ce nouveau dispositif favorise aussi le dialogue entre les équipes. Celle chargée de la gestion client a ainsi suggéré à l’équipe technique de faire évoluer l’interface du questionnaire en ligne pour augmenter le taux de participation moyen des salariés, et le résultat a été au rendez-vous.

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