Management
Toujours plus cruciale dans un monde centré sur l’innovation, la formation évolue. La réforme adoptée durant l’été est entrée en application le 1er janvier. Voici les principaux changements à prendre en compte et les dispositions à anticiper.

Vous n'avez jamais vraiment compris à quoi servait le DIF [droit individuel à la formation] et n'en savez pas davantage sur le CIF [congé individuel de formation] ? La réforme qui entre vigueur en ce début d’année est faite pour vous : elle remet tout à plat dans le domaine de la formation. Le compte personnel de formation [CPF] est désormais l’un des quatre droits ou dispositifs mobilisables pour se former, faire un point dans sa carrière ou évoluer, à côté du bilan de compétences, de la validation des acquis de l’expérience [VAE] et du CPF de transition professionnelle [ex-congé individuel de formation]. Les cinq points à connaître pour bien intégrer la réforme.



1. Les heures du compte CPF transformées en euros

À la suite de la réforme de la formation professionnelle, le compte personnel de formation ne sera plus alimenté en durée mais en euros. Les heures actuellement comptabilisées devraient être valorisées à hauteur de 15 euros pour intégrer la nouvelle mouture du dispositif. Les plus chanceux disposeront d’un capital initial déjà appréciable, note Cyril Parlant, avocat du cabinet Fidal spécialisé en droit de la formation : « Au 31 décembre 2018, un(e) salarié(e) à temps complet travaillant depuis 2008 aura potentiellement accumulé sur son CPF un total de 216 heures, ce qui représente, une fois monétisée, à raison de 15 euros par heure, un capital de 3 240 euros ! »

 

2. Le nouveau fonctionnement du compte CPF

Dès 2019, le compte personnel de formation est alimenté chaque année à hauteur de 500 euros pour les salariés disposant d’un niveau au moins égal au niveau V (brevet, CAP), et à hauteur de 800 euros pour ceux ne disposant pas de ce niveau. L'alimentation se poursuit sur une période de dix ans. Au-delà, si le salarié n’a effectué aucune formation, l’abondement est interrompu. Autrement dit, le compte est alimenté jusqu’à un montant maximal de 5 000 euros ou de 8 000 euros. « Pour les salariés à mi-temps ou entre le mi-temps et le temps complet, les droits seront les mêmes que pour ceux à temps complet, précise Cyril Parlant. Ils seront en revanche inférieurs si la durée du travail est inférieure à un mi-temps. En cas d'inactivité, de chômage par exemple, le compte CPF cesse d'être abondé. Ce système se base sur une logique qui fait reposer les droits sur le travail mais cela crée un handicap pour ceux qui sont sans emploi. »



3. Le CPF de transition professionnelle

S'il reprend la philosophie du congé individuel de formation, le CPF de transition professionnelle fonctionne différemment. Les formations éligibles au CPF de transition professionnelle ne sont plus celles du CIF, explique Philippe Piccoli, avocat du pôle de droit de la formation professionnelle du cabinet Fromont Briens : « Désormais, elles seront identiques à celles du CPF classique alors que le CIF n’était pas limité en termes de formation, il avait un but d'émancipation sociale, d'ouverture à la connaissance. Il n'était pas centré uniquement sur les compétences professionnelles. »



4. Une appli pour gérer son compte CPF

Le gouvernement a aussi annoncé le lancement d’une appli sur mobile. La Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), qui s'est vu confier la gestion du CPF, prévoit une disponibilité à l'automne 2019. « Elle devrait permettre de faire des recherches à partir de son mobile sur les formations reconnues, voire de s’inscrire directement dans celle qui aura été choisie », explique Florence Bay, responsable certification, relations financeurs et qualité de l’organisme de formation Demos. Une aubaine pour les plateformes qui proposeront de s'inscrire en ligne.



5. Les précautions à prendre en 2019

Les salariés qui souhaitent se lancer dans une action de formation en 2019 devront faire preuve de vigilance. Cette année marque en effet une transition entre l’ancien et le nouveau système. Pour l'heure, le financement des formations est encore du ressort des OPCA (organisme paritaire collecteur agréé). « Selon les OPCA, il faut prévoir un délai de traitement qui peut atteindre jusqu’à douze semaines, avertit Philippe Piccoli. Cette difficulté cessera en 2020 lorsque la CDC prendra en charge à la fois la gestion des compteurs et la mobilisation financière du compte. En 2019, les salariés doivent donc vérifier les modalités de mobilisation de leur compte. »

Trois questions à… Cyril Parlant

« Inciter à se former »

Cyril Parlant, avocat du cabinet Fidal spécialisé en droit de la formation.



Quelle est la logique du nouveau dispositif ?

Il s’agit d’inciter les titulaires d’un compte personnel de formation à se former au moins une fois tous les dix ans. Sur l’ensemble d’une carrière moyenne, soit 40 ans, la collectivité consent un effort important puisque chaque salarié peut potentiellement percevoir 20 000 euros, voire 32 000 euros pour les salariés avec un niveau de formation inférieur à V (Brevet ou CAP).



Le montant annuel de 500 euros n’est-il pas trop faible ?

Il ne faut pas oublier que cette alimentation est régulière et reconduite chaque année et que le système précédent n’était pas plus avantageux. Le CPF était financé par une cotisation représentant 0,2 % de la masse salariale. Avec un tel taux, il fallait avoir un salaire annuel de 250 000 euros pour parvenir à dégager un budget annuel de 500 euros pour la formation…



Va-t-il être plus simple de choisir et de suivre une formation ?

L’appli doit permettre aux salariés de choisir leur formation, mais personne ne s’engage dans une formation comme il achèterait un bien de consommation courante. Le premier interlocuteur des salarié(e)s en emploi, ce sont les managers, les responsables RH, et la discussion autour de la formation doit prendre place au sein de l’entretien professionnel. Ils pourront aussi faire appel aux Conseillers en Evolution Professionnelle, qui seront positionnés dans les structures comme Pôle-Emploi, Cap Emploi et des opérateurs locaux.





ENCADRÉ 



Comment ne pas perdre les heures du DIF ?

En 2014, une réforme de la formation professionnelle avait créé le le droit individuel de formation (DIF). Si ces heures n’ont pas été utilisées, chaque salarié doit les saisir dans son compte personnel de formation en ligne (https://www.moncompteactivite.gouv.fr/). « Pour savoir combien d'heures il faut ajouter, il faut se référer à l’attestation fournie par son employeur ou au dernier bulletin de salaire de l’année 2014, qui indique le nombre d'heures restant à utiliser par le salarié au titre du DIF, explique Florence Bay, responsable certification, relations financeurs et qualité de l’organisme de formation Demos. Il faut naturellement conserver ces documents, que ce soit l'attestation ou le bulletin de salaire de 2014 sur lesquels figure cette donnée. » Ces heures ne seront pas mélangées avec celles déjà présentes sur le CPF. Elles seront reportées sur une deuxième ligne, distincte, et transformées en budget, a priori avec le même multiple de 15 euros par heure. Ce budget issu du DIF a toutefois une particularité : il est « périssable ». « Cela signifie que le salarié doit utiliser ce budget “ex DIF” avant le 31 décembre 2020. S'il ne le fait pas, il sera perdu et il ne pourra plus l’utiliser pour se former », avertit Florence Bay.

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