Digital
Les nouveaux sites de recrutement sont mobiles, donnent accès à des offres géolocalisées et réalisent le matching grâce à des algorithmes.

Algorithmes, mobile, géolocalisation… Voilà les trois piliers sur lesquels reposent les sites emplois nouvelle génération. Ils promettent de faire correspondre intelligemment les compétences des chercheurs d’emploi avec les offres, et si possible en trouvant un job à proximité des candidats. Le matching, c’est la promesse de Qapa, fondé en 2011, qui connait un bel essor: le site revendique 6 000 nouveaux inscrits chaque jour en moyenne et plus de 4,5 millions d’inscrits. Il met en relation les souhaits et compétences des candidats avec les besoins des recruteurs via un algorithme spécifique. Même recours à la technologie chez Breaz, spécialiste des métiers digitaux (développeurs, data science, product managers, designers UI/UX), racheté par le réseau Hired début 2016. Le site présélectionne en amont les candidats avant qu’ils puissent s’inscrire, via un mix d’analyse algorithmique et humaine. Le but? Déterminer leur réelle intention de trouver un nouveau poste et leurs capacités techniques. Les recruteurs sont également sélectionnés. «Beaucoup d’appelés mais peu d’élus, précise Corentin Guillemard, cofondateur. Nous gardons en moyenne 5% des candidats et 40% des recruteurs.» En septembre, Hired revendiquait plus de 2 000 candidats inscrits et 750 entreprises utilisatrices.

Autre innovation: les recruteurs n’émettent pas d’offres mais se voient proposer sur leur espace une série de candidats pendant une quinzaine de jours. À charge pour eux de se connecter, d’analyser les profils puis d’émettre des demandes d’entretien. «Elles doivent être personnalisées et mentionner une proposition de rémunération», indique Corentin Guillemard. De leur côté, les candidats sont tenus de répondre rapidement. «En moyenne, les demandes d’entretien reçoivent une réponse positive dans 65% des cas, soit un taux bien plus élevé que sur les job boards traditionnels», estime Corentin Guillemard. Pour faciliter le processus, candidats et recruteurs peuvent faire appel à des conseillers du site. Résultat, Hired revendique une réduction significative du délai de recrutement –20 jours contre 60 jours en moyenne– mais aussi l’accès à un vivier hors de portée des job boards traditionnels: «Les candidats en poste n’y vont pas», assure Corentin Guillemard.

Fini le CV, place aux «attributs»

De son côté, Job Around Me mise sur la génération mobile et une nouvelle vision. Fini le CV, place aux «attributs». «Nous avons systemisé le travail à travers une matrice, explique Jean Mariotte, CEO de Job Around Me. Elle permet de déterminer dans quel environnement un candidat va s’épanouir –humain, social, business– et le type d’actions qu’il aime: apprendre, gérer, communiquer...» En lieu et place d’un CV, chaque candidat est donc profilé avec des «attributs», une vingtaine au maximum. «Les compétences et les métiers évoluent alors que la personnalité est un élément plus stable», estime Jean Mariotte. Le processus vise à diriger la bonne offre vers le bon candidat et donc à réduire le délai de recrutement. «Nous allions la réactivité du mobile avec l’intelligence de l’algorithme», résume Jean Mariotte. Job Around Me revendique 30 000 offres sur son site, dont 20% en lien avec le digital (développeurs, marketing digital, chef de projet, community manager). «Les start-up figurent parmi les employeurs qui apprécient le plus le site», estime Jean Mariotte.

Des candidats contactés en 24 heures

Autre acteur totalement mobile, Corner Job a été lancé en 2015 simultanément en France, en Espagne et en Italie, et cible les jobs non cadres (vente, grande distribution et services clients/télévente). «Nous nous adressons à une population jeune qui ne va pas sur les sites traditionnels qui réclament un CV, un certain niveau d’études, d’expérience, etc.», explique David Rodriguez, son CEO. Corner Job mise sur la simplicité et la rapidité. Il suffit d’une minute pour déposer une offre. Les candidats remplissent un CV simplifié qui mentionne aussi la distance séparant leur domicile de l’emploi auquel ils postulent. En 24 heures, ils sont contactés par une entreprise et un chat peut même s’engager avec eux. Pour réussir à connecter aussi rapidement les offres et les candidatures, Corner Job fait tourner un algorithme qui établit un ranking (classement) à double entrée. Les candidats se voient ainsi proposer les offres collant le mieux à leur profil et les entreprises les CV susceptibles de satisfaire au mieux leurs exigences. Corner Job revendique un rythme mensuel de 600 000 téléchargements et plus de 3 millions d’applis en utilisation.

Welcome to the Jungle

Si tant de recrutements échouent, c’est bien souvent parce que les candidats n’en savent pas assez sur leur futur employeur. Forts de ce constat, Jérémy Clédat et Bertrand Uzeel lancent Welcome to the jungle (WTTJ) en 2015. «Nous faisons découvrir l’entreprise de l’intérieur avec des chiffres-clés et des contenus inédits, explique Camille Montaz-Rosset, responsable de la communication. Nous nous rendons sur place pour réaliser des vidéos et des interviews de salariés.» Alors que les candidats potentiels accèdent gratuitement à toutes ces données à travers leur profil Linkedin, les entreprises doivent acquitter un abonnement mensuel variable selon leurs effectifs. D’ailleurs, Welcome to the jungle se considère comme un média et non un job-board.

 

 

Avis d’expert

«L’enjeu de demain, c’est l’IA»

Jacques Froissant, CEO du cabinet de recrutement Altaïde

Les algorithmes vont-ils rendre le recrutement plus efficace?

Jacques Froissant. Le véritable enjeu, c’est l’intelligence artificielle (IA) appliquée au sourcing. Cela permettra d’identifier automatiquement les profils les plus adaptés aux offres en termes de compétences, de localisation, de rémunération mais aussi de savoir-être, de soft skills, d’environnement le plus propice au candidat, et de valeurs. Ce type de démarche commence à être mis en œuvre par des sites comme Qapa ou Meteo Job.

 

Qu’apporte l’IA?

J. F. La force de l’IA, c’est qu’elle n’est pas orientée par les a priori que peuvent avoir des recruteurs et qu’elle scanne toutes les données de l’entreprise. Aux États-Unis, des expériences menées avec des outils basés sur l’IA mettent en relief que les meilleurs vendeurs ne sont pas ceux qui collent au profil classique le plus recherché. Cette démarche peut s’avérer aussi très utile dans la mobilité interne, pour les entreprises mais aussi pour les candidats qui auront plus de chances de se retrouver dans une entreprise qui leur convienne vraiment.

 

Ces nouvelles méthodes fonctionnent-elles aussi pour recruter des managers?

J. F. Les besoins explosent partout, ce qui aboutit à une pénurie. D’où la nécessité de s’appuyer sur des spécialistes pour identifier les profils recherchés, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur. Parmi les équipes digitales se trouvent en effet des personnes à fort potentiel. L’enjeu est de les trouver, puis de les accompagner. 

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