Digital manager
Pierre Calmard, CEO d'I Prospect, cultive un style de management en rupture : il a d’ailleurs supprimé son comité de direction, il y a six mois.

On peut faire de la performance digitale et être un peu poète: «Depuis quatre ans, chaque semaine, j’envoie mon e-mail du vendredi, où je raconte la vie de l’entreprise sans langue de bois, de façon très disruptive, sous la forme d’un faux sonnet de Verlaine, relate, amusé, Pierre Calmard, CEO d'I Prospect. Je raconte aussi bien la dernière conférence, je récapitule les compétitions en cours, les gains de budgets…» Une façon pour cet ancien khâgneux d’entretenir sa plume. I Prospect est une agence spécialisée dans la performance digitale du groupe Dentsu Aegis Network: «Notre activité va du référencement naturel, aux liens sponsorisés, au social media, achats programmatiques, et consulting en big-data», liste Pierre Calmard. L’agence vise plus de 30 millions d’euros de marge brute en 2016 et compte 220 salariés.

Le style de management de ce dirigeant qui roule sa bosse dans le digital depuis près d’une quinzaine d’années? «Le seul vrai patron d’une entreprise ce n’est pas celui que les actionnaires ont élu, mais celui que les gens éliraient, la légitimité cela doit se gagner, estime-t-il. D’ailleurs le plus beau compliment que l’on m’ait fait, c’était de me traiter de “chef de meute”. Il y a des gens qui me suivent dans chaque nouvelle entreprise depuis Isobar.»

Intuitif et rationnel

Pierre-Emmanuel Cros, ex-directeur général de Performics, estime que la force du patron d’I Prospect est de savoir bien allier l’intuitif au rationnel. D'ailleurs, ajoute-t-il, cette citation de René Char lui sied bien: «Je gouvernais sans doctrine avec une véhémence sereine» («Pénombre»). Le patron de I Prospect a supprimé le comité de direction il y a six mois: «Je l’ai remplacé par six comités (innovation, budget, ressources…), cela permet de rompre avec une vision centralisée, d’impliquer plus de monde et de descendre plus bas dans l’échelle hiérarchique, dit-il. Les gens en ont marre des postures, ils veulent rompre avec une non-transparence qui les infantilise, ils veulent être impliqués dans les décisions.» Chez I Prospect, la moyenne d’âge est de 28 ans. Et le manager a aussi une approche originale pour gérer les promotions: «Quand un jeune vient me voir en me disant qu’il mériterait un poste», je lui réponds: «Je veux bien te promouvoir mais ce n’est pas moi qui vais te nommer, c’est l’écosystème, il faut que cela s’impose comme une évidence», explique Pierre Calmard.

Son surnom après des salariés? «Gandalf le gris», du nom du magicien dans Le Seigneur des anneaux: «Peut-être en raison de ma longue expérience dans le digital, les équipes viennent souvent me voir pour que je leur trouve des idées, des solutions», sourit-il. Ses limites? «Je l’ai connu très orgueilleux même si cela peut être une force, car il est toujours tourné vers les objectifs mais quand il n’obtient pas ce qu’il veut, il peut être assez dur», indique Pierre-Emmanuel Cros.

Enfin le manager a une marotte quand il recrute: «Je demande toujours au candidat s’il a un défaut à corriger pour le poste que je lui propose. Ce qui m’intéresse c’est de comprendre si la personne a conscience de cette limite et a envie de travailler dessus. C’est aussi une façon d’évaluer son état d’esprit: cela permet de voir comment il se projette dans les difficultés. Je veux des gens positifs, qui ont envie d’apprendre.»

Parcours

1968. Naissance à Téhéran (Iran).

1991. Diplômé de l’Ensae, puis d’HEC.
1993. Directeur du département nouveaux médias de Médiamétrie.
1999. Directeur général d’Isobar (ex Carat multimédia, puis Carat interactive).
2007. Directeur général France, puis international de Netbooster.
2012. CEO d’I Prospect France. 

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