Art
Artiste contemporain de l'entre deux siècles, Kongo se bat au quotidien pour la reconnaissance du graffiti. Un savoir-faire lui venant de la rue qu'il transpose désormais sur des produits haut de gamme.

Kongo… Avec cette signature, l’artiste s’amuse à stimuler l’imaginaire. « On visualise plutôt un grand black derrière ce nom », s'amuse Kongo. En réalité, Cyril Phan, de son vrai nom, est né à Toulouse d’un père vietnamien et d’une mère française. Il déménage au Vietnam jusqu’à la chute de Saïgon en 1975. Puis, changement de décor, il suit sa mère à Brazzaville, au Congo. Un pays dont il tombera amoureux. « Je m'y suis épanoui en tant qu’être humain, indistinctement des questions d'origine et de couleur de peau. » En référence à ce lien passionné à la terre africaine, le surnom de Kongo est resté. Comme une métaphore d'universalité.

Des pages faits divers aux pages culturelles

Sales, vandales, délinquants... les graffeurs auront tout entendu. Kongo inclus. Trop longtemps cantonné au cliché de la marginalité, le graffiti a pourtant vu son image prendre un tout autre virage depuis quelques années. Parti de la rue, le graffiti s’exporte dans les musées et s’affiche sur des vêtements de luxe. Si cet art urbain a évolué dans l’inconscient du public, c’est surtout parce que les galeristes l’ont rebaptisé sous le terme plus générique de « street art ». Ces noms inventés par le marché, Kongo s’en incommode et s’en accommode à la fois : « Le fait d’avoir été vus comme des parasites pendant tant d’années nous a poussés à nous suffire à nous-mêmes. Grâce à notre travail, le graffiti est passé des pages faits divers aux pages culturelles. » En éveil sur l’actualité, il profite des projecteurs pour mettre en lumière certains faits de société. Depuis 2002, il se bat avec son association Kosmopolite pour transmettre l'art du graffiti aux jeunes de banlieue. Et en octobre dernier, à l’occasion de la Fashion Week parisienne, Kongo a mis aux enchères une voiture - customisée par ses soins au salon Frieze à Londres - au profit des migrants : « Je veux aider les gens qui sont rejetés comme j’ai pu l’être étant plus jeune », explique-t-il. Pour autant, Kongo ne se considère pas comme un artiste engagé : « Je fais seulement ce que j’ai à faire », tranche le graffeur, non sans pudeur.

Aujourd'hui, les plus grandes maisons sont passées au crible des bombes de peinture de Kongo : Hermès et son célèbre carré de soie, le cristal de Daum et les fameuses montres de Richard Mille. « Ce ne sont pas les marques de luxe qui m’intéressent mais la rencontre entre deux univers. Je veux amener mon art, parti de rien, à l’excellence. Comme le charbon qui peut se transformer en diamant. » Son prochain projet portera sur les classiques de La Cornue, qu'il entend transformer en « Rolls-Royce des pianos de cuisine », ironise-t-il. À moitié ? 

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