Tribune
À l'heure du tout gratuit, il est temps que la capacité de traitement des données monte en gamme. Seule cette premiumisation permettra de redéfinir le prix de la donnée.

On fantasme beaucoup sur la data, cette compilation d’informations publiques collectées et mises à disposition sur internet. La technologie permet l’agrégation de masses considérables de données brutes, si facilement accessibles que la gratuité semble naturelle, dans tous les domaines. Mais la valeur ajoutée provient de la capacité de traitement de ces données, et c'est ça qui détermine leur prix. Car, l’information a un prix. Après la massification, il est temps de passer à la premiumisation. Seule une montée en gamme de la capacité de traitement des données permettra d’en déterminer un prix réel. Encore faut-il être capable de fournir une information différenciante.

Au commencement, il y a la matière brute, le tout et le rien à la fois. Le tout, car y figurent supposément tous les ingrédients nécessaires à la création de l’univers. Le rien, car ce magma, s’il est à l’origine de tout, n’en demeure pas moins informe. Présentée au gré des effets de mode, ou des marronniers médiatiques, comme l’alpha et l’omega, le nouvel or noir prélude à une nouvelle ruée. Vers quoi, nul ne le sait précisément. Ne compte que la vision globale, la « big picture ». C'est aussi le grand flou.

Agréger des données n’a pas de sens en soi. Certes, on a découvert au fil du temps et des évolutions récentes d’internet que des acteurs comme Google avaient développé des capacités d’agrégation inédites. Reprenons la vocation initiale de Google : un méta-moteur ayant pour objectif d’apporter à l’internaute une réponse à ses requêtes dans un laps de temps le plus court possible. Certains ont eu, au début des années 2000, quelques surprises en découvrant la capacité qu’avait le moteur de recherche de rassembler en un même espace des informations oubliées ou que l’on pensait anodines. Divine surprise donnant un avant-goût de ce qu’allait devenir l’internet tel que nous le connaissons et qui, comme l’univers, continue son développement selon les lois édictées par des chercheurs et développeurs. Chaque individu utilisateur d’un outil numérique génère de la donnée. Il ne s’agit plus de simples traces laissées au hasard des visites sur internet. Il s’agit de production lourde de contenus, qu’il s'agisse de texte, de photo, de vidéo, de données de géolocalisation ou de métadonnées diverses.

Valeur inestimable

La vie d’un individu, d’une organisation, d’un groupe, d’une communauté peut être rassemblée, compilée et décortiquée, dans un but pas toujours vertueux. On l’a vu avec le scandale Cambridge Analytica, lorsque des données récoltées sur Facebook, un gisement inépuisable alimenté en temps réel par des foules sentimentales inconscientes, ont été utilisées dans un but politique clair. Sans verser dans l’approche paranoïaque, et en gardant recul et tête froide, nous avons là un cas typique de valorisation des données dans un objectif précis. Du point de vue des bénéficiaires, l’exploitation de ces données leur a conféré une valeur inestimable. En effet, le ROI a été d’un certain point de vue mesurable, puisqu’ayant interféré dans la dernière élection présidentielle américaine.

Dans le domaine de l’intelligence économique, l’agrégation des données et leur analyse sont clés. Piloter une entreprise ne peut se faire sans indicateurs fiables sur son environnement. Pas de business sans information qualifiée. Pour développer une activité, il faut prospecter : voilà un domaine où la quantité et la gratuité ne sont pas synonymes de rentabilité, car la qualité de la donnée est un discriminant important pour trouver des cibles qualifiées, et faire gagner du temps à ses équipes commerciales.

Un outil performant

Pas de maitrise des risques non plus sans données. Engager des relations d’affaires ne peut se faire sans recueillir des informations les plus exhaustives possibles sur ses concurrents, ses fournisseurs, ses partenaires. La donnée doit sans cesse être actualisée au gré de son enrichissement quasi permanent. Le pilotage à vue n’est plus possible dans un environnement économique instable. Le monde connecté a ses vertus mais aussi ses conséquences, notamment sur l’accélération des échanges.

A ce titre, le chef d’entreprise doit avoir accès à de l’information synthétique, véritable aide à la décision, permettant de s’adapter à tout changement de contexte. Être surinformé ne sert à rien. Les experts des médias dénoncent depuis des années les effets négatifs de l’infobésité. Au même titre que trop d’info tue l’info, trop de data tue la data. Etre informé sur tout sans hiérarchie, en vrac, n’a pas de sens.

La vraie information n’a de valeur que si elle est traitée, triée, analysée. La premiumisation est la seule voie permettant de définir ce prix de la donnée. Tout comme le conseil gratuit n’a pas de valeur, la valorisation de la donnée est la seule façon d’en faire un outil performant, et un véritable atout pour les fournisseurs de données, comme pour les acheteurs. Pour enrichir l’existant et pour accroitre la performance.

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