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L’accord du groupe Canal+ et de SFR autour de RMC Sport est-il une bonne affaire pour la chaîne cryptée ? SFR, qui table sur un bouquet foot à moins de 40 euros, risque de lui faire de l’ombre.

Les difficultés techniques de visionnage de la Ligue des Champions sur la plateforme OTT de RMC Sport, le 18 septembre, n’est pas une si mauvaise affaire pour SFR. Son patron, Alain Weill, qui s’est démultiplié sur toutes les radios le lendemain, pour expliquer qu’il avait été victime d’un afflux de 200 000 abonnés dans la journée, en a profité pour annoncer un bouquet « à moins de 40 euros » pour les fans de foot. À l’intérieur de cette offre, l’ensemble de la Ligue 1 avec Canal+ et BeIn Sports (jusqu’en 2020) ainsi que La Ligue des champions, la Premiere League anglaise et le foot portugais avec RMC Sport. Une offre qui ressemble au pendant sportif du pack familial de Canal+ centré sur les séries et le cinéma (à 39,90 euros). En comparaison, le pack sport de Canal+, avec BeIn Sports et Eurosport, revient à 34,90 euros pour un engagement de deux ans, et il faut ajouter 9 euros minimum pour accéder aux droits de RMC Sports. Bref, le fameux bouquet foot de SFR risque bien de devenir le moyen d’accès privilégié aux compétitions de ballon rond en France, au moins jusqu’au lancement de l’offre de Mediapro – et la clarification des sous licences disponibles -, à partir de 2020.

« Cela part dans tous les sens »

À Canal+, cette situation n’est pas ressentie comme un danger. « SFR ne nous distribuait plus vraiment, c’était un peu la belle endormie », confie-t-on au sein du groupe. Laisser l’opérateur prendre en charge la distribution de ses chaînes, sans obérer ses chances de faire de même avec Orange, Bouygues ou Free, relèverait donc d’une judicieuse politique commerciale. « On préfère que SFR vende Canal+ », répète-t-on, tout en soulignant que l’acteur historique de la TV payante propose 30 films frais par mois, ce qui est loin d’être le cas de l’opérateur détenu par Altice qui doit supporter un lourd investissement sportif : 370 millions d’euros par saison entre 2018 et 2021.

Le risque n’est-il pas, pour autant, que SFR aille ensuite négocier directement avec Mediapro des droits de la Ligue 1 pour avoir la maîtrise de son bouquet foot ? « On a l’impression que cela part dans tous les sens, résume Claire Barbaret, analyste chez Invest Securities, BeIn Sports a eu une partie de la Ligue 1, puis SFR est arrivé avec la Premiere League et la Champions League et enfin Mediapro arrive dans deux ans. Certes, Canal pourra toujours négocier pour avoir des droits à côté de la chaîne de Mediapro mais on ne sait pas à quel prix. À force de radiner, le groupe risque de payer trois fois plus cher. » 

Faute originelle

Selon un ancien dirigeant de Canal+, la faute originelle incombe à Vincent Bolloré qui a accepté « un affaiblissement du modèle premium » de la chaîne cryptée. À l’heure où Sky vient de donner une flambante illustration de sa valeur en vendant 30% de ses actions à Comcast pour 34 milliards d’euros, la démonstration est faite qu’une télévision à péage raflant les principaux droits a de l’avenir. Bolloré, en pariant sur une distribution de mini-bouquets avec Orange et Free, aurait selon lui fragilisé le modèle économique avec des offres d’entrée de gamme en dessous de 30 euros. « Canal a ensuite dû désinvestir dans les programmes et l’image de Bolloré n’a pas aidé à fidéliser les abonnés », conclut Claire Barbaret.

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