Le billet de Delphine Le Goff

Peut-on encore plaisanter avec l’humour ? L’heure n’est plus au mauvais esprit, à la jouissive raillerie, au ricanement libérateur. Le politiquement correct fait florès sur les réseaux sociaux, premiers vecteurs du premier degré et de la bien-pensance. Mais sait-on encore ce qu’est le second degré ? Il ne semble, en effet, plus compris par personne. Ni par ceux qui ont, à défaut du rire, l’offusquement facile, et qui auraient trollé les Desproges et autre Jean Yanne. Ni par ceux qui, en 280 signes, entendent faire les malins, en y allant de leurs atroces saillies sous couvert d’humour noir. Amusant ou honteux, ce tweet d’Eugénie Bastié sur le gendarme Beltrame, qui prétendait sans doute à l’ironie ? « Ne jugeons pas trop vite cet homme en héros [sic], il a peut-être mis des mains aux fesses à Saint-Cyr ». Devant la bronca, Bastié s’est excusée urbi et orbi - hormis auprès de la famille de la victime. En cas de bide, plutôt que des actes de contrition, nombreux brandissent aussi, tel un bouclier, le fameux « second degré ». La chroniqueuse de TPMP, Agathe Auproux, embarrassée par la réapparition de tweets hyper LOL comme « J’aimerais Justin Timberlake même s’il était noir » revendiquait ainsi la « provoc » et l’imparable « second degré ». Quel genre d’humour Mehdi Meklat, ex-journaliste du Bondy Blog, auteur de tweets antisémites et homophobes, invoquera-t-il dans son prochain livre, à paraître chez Grasset, où il reviendra sur la polémique ? Second degré partout, humour nulle part ? Si on ne peut plus rigoler…

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