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Les accusations de harcèlement contre des photographes de mode poussent à la réforme des magazines que les militantes féministes n’épargnent pas toujours.

Hasard du calendrier, le 2 février dernier, le groupe Condé Nast d’un côté, les magazines Elle et Version Femina de l’autre, se sont engagés en faveur de la protection des mannequins employés lors des séances photo. Pour le groupe américain (Vogue, Vanity Fair, Glamour…), l’objectif est, explicitement, de « traiter le problème du harcèlement sexuel ». Le code de bonne conduite mis en place par l’éditeur invite ses employés à « faire preuve de respect, d’intégrité et de responsabilité à l’égard de leurs autres collaborateurs », et bannit les mannequins mineurs, sauf dérogation dans le cadre d’un portrait ou d’un reportage. Des accusations de harcèlement contre trois photographes stars, Mario Testino, Bruce Weber et Terry Richardson avaient déjà amené le groupe à s’en démarquer.

Les tailles 32, bannies

Lagardère Active a choisi pour sa part de signer la charte sur les relations de travail et le bien-être des mannequins dont les groupes de luxe Kering et LVMH se sont dotés. Sont bannies des castings les tailles 32, tandis que la présence d’un chaperon devient obligatoire pour les mannequins de 16 à 18 ans. « Dans la continuité de ce que, nous-mêmes, nous faisions déjà, on a choisi de relayer cette action », explique Stéphanie Videau-Aphatie, directrice de la communication de Elle, précisant que « cela ne sert à rien que les marques s’engagent si les magazines embauchent toujours des filles trop maigres ».

Plus largement, la presse féminine reste sous le feu des critiques de certaines militantes féministes. L’émancipation de la femme a pourtant toujours fait partie de l’ADN de titres comme Marie Claire ou Elle. Ce dernier a été le premier à monter au créneau pour fustiger ceux qui mettaient en avant le chanteur Bertrand Cantat, condamné pour homicide involontaire sur sa compagne, l'actrice Marie Trintignant. Mais dans les cercles féministes, on n’a pas de mots assez durs pour une presse accusée de véhiculer « le stéréotype d’une femme blanche, trentenaire et CSP+ » et qui représente, selon ses détractrices, « le dernier endroit où la révolution féministe va avoir lieu ».

Les diffusions astronomiques de ces titres (plus de 600 000 exemplaires pour Femme actuelle par exemple) plaident en faveur de leur modèle. « Ce genre d’arguments participe à envenimer les choses et à appuyer sur les mauvais boutons de la guerre des sexes », balaie Erin Doherty, directrice de la rédaction de Elle. « Nous aussi, on se voit comme un média féministe, soutient de son côté Ada Mercier, directrice de la rédaction du site Le Journal des Femmes, qui va se décliner en format papier le 29 mars. Nous ne le faisons pas à la façon d’un Causette, où tous les sujets tournent autour de ça, mais dans la façon de donner des modèles ou de mettre en avant des femmes. »

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