Audiovisuel

Le Conseil constitutionnel a donné raison vendredi 27 octobre aux chaînes de télévision qui contestaient la taxe payée au Centre national du cinéma (CNC), mais ce dernier a jusqu'à juillet 2018 pour modifier cette taxe, sa ressource principale, et ne verra pas son budget menacé. Le Conseil constitutionnel avait été saisi par le Conseil d'Etat d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), suite à un recours d'une filiale du groupe M6, EDI TV, concernant l'assiette de la «taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision».

 

290 millions d'euros par an


Cette taxe est due par les chaînes de télévision et est assise sur les recettes de la publicité et des parrainages versées non seulement aux chaînes elles-mêmes, mais aussi aux régies publicitaires, rappelle le Conseil constitutionnel. Cette «taxe sur les services de télévision» apporte au CNC environ 290 millions d'euros par an, précise ce dernier. Or, EDI TV avait plaidé que cette assiette, en incluant les sommes perçues par les régies, qui ne sont pas forcément récupérées au bout du compte par les chaînes de télévision, était contraire au principe d'égalité devant les charges publiques puisque la taxe était ainsi prélevée «sans tenir compte des facultés contributives de ses redevables», selon la décision.

Un argument validé par le Conseil constitutionnel, qui a jugé qu'«en posant le principe de l'assujettissement, dans tous les cas et quelles que soient les circonstances, des éditeurs de services de télévision au paiement d'une taxe assise sur des sommes dont ils ne disposent pas» (à savoir celles perçues par les régies publicitaires), «le législateur a méconnu les exigences» posées par l'article 13 de la Déclaration de 1789, à savoir que les impôts doivent être répartis entre les citoyens «en raison de leurs facultés».

Le Conseil constitutionnel a donc déclaré contraire à la constitution la mention des régies publicitaires et de parrainage dans la définition de l'assiette de la taxe. Mais, point crucial pour le CNC, et alors qu'EDI TV avait demandé une censure de la taxe avec effet immédiat, ce qui aurait pu conduire au remboursement des sommes versées, le Conseil constitutionnel a décidé «de reporter au 1er juillet 2018 la date de prise d'effet de cette déclaration», et ce «afin de permettre au législateur de tirer les conséquences de la déclaration d'inconstitutionnalité des dispositions contestées».

 

Délai jusqu'à mi-2018 pour revoir la taxe


«D'ici à ce que le législateur y remédie, s'il choisit d'intervenir, la taxe continuera donc à être prélevée en application des dispositions contestées», a précisé l'instance dans un communiqué. Le système français prévoit que les diffuseurs d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles contribuent au financement pour la création de ces oeuvres.

Par conséquent le chiffre d'affaires des salles de cinéma, mais aussi les chaînes de télévision, la vidéo, la vidéo à la demande et internet sont soumis à une taxe, gérée par le CNC. Le CNC s'est félicité du délai accordé jusqu'à mi-2018 pour revoir cette taxe. "Il permet au Parlement, d'une part de sécuriser la taxe pour l'avenir, et d'autre part de la consolider pour le passé pour éviter tout effet d'aubaine" qu'aurait constitué un remboursement a posteriori de cette taxe, se réjouit-il.

Sa présidente, Frédérique Bredin relève toutefois dans ce communiqué que le recours des chaînes de télévision «aurait pu porter une atteinte très grave à tout le système de financement de la création». Le ministère de la Culture a annoncé pour sa part qu'une mesure de sécurisation de la taxe «sera présentée dans le projet de loi de finances rectificative déposé mi-novembre».

 

Faire contribuer Netflix


De son côté, le groupe M6 a appelé vendredi les pouvoirs publics à «rééquilibrer» le financement du Centre national du cinéma, en y faisant contribuer plus fortement les nouveaux acteurs de type Netflix, après l'invalidation de la principale taxe collectée par le CNC et le délai accordé jusqu'en juillet pour revoir cette taxe. «Le groupe M6 demande dès lors aux pouvoirs publics que ce délai soit mis à profit pour rééquilibrer la taxation entre les acteurs historiques du secteur et les nouveaux opérateurs, essentiellement internationaux», une allusion aux plateformes de vidéo en ligne comme Netflix ou Amazon, a plaidé le groupe M6 dans un communiqué. «Et ce, afin de tenir compte des évolutions concurrentielles considérables auxquelles les chaînes de télévision généralistes sont confrontées», ajoute-t-il. En effet, «la quasi-totalité» des diverses taxes qui financent le CNC «repose aujourd'hui sur les acteurs historiques, et une part infime sur les nouveaux opérateurs», précise le groupe privé

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