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Face au géant Google, les éditeurs de presse sont parvenus à dépasser leurs divergences pour parler d’une même voix. Une union rare, et qui reste fragile.

La presse quotidienne nationale main dans la main avec la presse magazine d'information, la presse régionale et départementale et même la presse gratuite: rares sont les sujets sur lesquels l'ensemble des éditeurs parviennent à se mettre d'accord. Google en est un. Réunis au sein de l'association de la presse d'information politique et générale (IPG), ils demandent une meilleure répartition de la manne publicitaire captée par le moteur de recherche grâce à l'indexation de contenus de presse.


«Les éditeurs sont dos au mur, ils ne pourront pas s'en sortir s'ils continuent à être désunis, explique Patrick Eveno, historien des médias et auteur d'Histoire de la presse: de Théophraste Renaudot à la révolution numérique. Ils ont pris conscience que les enjeux aujourd'hui n'étaient plus corporatistes mais qu'ils se situaient entre les différentes industries culturelles et face à des acteurs internationaux. D'où la nécessité de parler d'une voix plus forte.»

 

Déjà en mars dernier, une étape importante avait été franchie avec la publication des premiers résultats de l'étude One. Pour la première fois, une même étude mesurait l'audience de l'ensemble de la presse, qu'elle soit quotidienne, magazine, payante ou gratuite. Cinq ans auront été nécessaires pour parvenir à mettre tout le monde d'accord.
«Pour que la presse soit plus forte face aux autres grands médias au plan publicitaire, il fallait en finir avec l'éparpillement des études d'audience. Nous voulons installer le réflexe de référencement de la presse dans les plans médias des annonceurs», soulignait alors Pierre Conte, président d'Audipresse et patron de la régie Figaro Médias.

 

Aujourd'hui, l'ennemi commun se nomme Google. A l'exception du Spiil, qui regroupe les pure players d'information, l'ensemble des éditeurs français sont favorables à l'instauration d'un droit voisin à l'indexation de leurs contenus. «C'est la première fois que toutes les formes de presse sont unies et réunies. Pour pouvoir développer nos entreprises, nous avons besoin des recettes lecteurs mais aussi des revenus publicitaires», soulignait le 28 novembre Marc Feuillée, directeur général du groupe Figaro, lors du salon La Presse au futur. Dans cette bataille, les éditeurs français font front commun avec leurs homologues allemands, italiens et depuis peu portugais et suisses.


Reste que sur d'autres sujets, les divergences demeurent. «L'enjeu de l'association IPG porte sur la redistribution de la valeur dans le monde numérique», insiste Denis Bouchez, directeur d'IPG. Pas plus. Parmi les points de divergences qui restent importants, la réforme des aides à la presse et leur ciblage vers les titres d'information politique et générale. «Au nom de quel principe démocratique on choisirait Le Nouvel Observateur plutôt que Elle ?, s'interrogeait le 30 novembre Denis Olivennes, président de Lagardère Active, devant l'association des journalistes média. Et compte-tenu du poids volumétrique de la presse magazine, son affaiblissement aurait un impact considérable sur la distribution de la presse. Ce qui peut être une très bonne idée à court terme peut être extrêmement dommageable à moyen terme.»


Autre initiative corporatiste, celle que lanceront en janvier prochain les six éditeurs de presse quotidienne nationale à destination du marché publicitaire. Au cours d'une grande conférence organisée à Paris, Le Figaro, Le Monde, Les Echos, les Editions Amaury, Libération et La Croix présenteront les résultats d'une étude Ipsos sur ce qu'attendent les lecteurs de la presse selon qu'elle soit gratuite ou payante... pour le plus grand profit des titres payants.

 

«Les quality papers sont pénalisés par la théorie publicitaire selon laquelle un contact est un contact, explique Luciano Bosio, conseiller auprès de la direction générale du Figaro. Même si nous sommes tous dans la même étude d'audience, un contact plus cher en presse nationale n'équivaut pas à un contact moins cher en presse gratuite. Cette idée est ruineuse pour les quotidiens nationaux.» L'armistice est encore loin d'être signé entre payants et gratuits.

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