Numérique
Marie-Laure Sauty de Chalon, PDG du groupe Aufeminin, a marqué les dernières Rencontres de l’Udecam en dénonçant la concentration des investissements publicitaires sur Google et Facebook. Pour Stratégies, elle revient sur cette intervention choc et présente les grands enjeux pour Aufeminin en 2017.

Que faire face à la concentration des investissements publicitaires entre les mains de Google et Facebook ?

Marie-Laure Sauty de Chalon. Aux États-Unis, la croissance des recettes publicitaires de Google et Facebook a été supérieure à 50% en 2016, alors que celle de l’ensemble des médias n’a été que de 1%. En France, 82% des 6% de croissance du digital ont été pris par Google et Facebook, d’après le SRI, ce qui laisse une portion congrue pour les autres. Il en va de la responsabilité des annonceurs : veulent-ils vraiment cette concentration ? Nous l’avons vu dans l’affaire du Pizzagate aux Etats-Unis, qui s’est soldée par une fusillade : ces contenus, qui étaient fake jusqu’à la fusillade, ont fait beaucoup d’audience ; mais les annonceurs veulent-ils vraiment se mettre sur ce type d’audience ? Il faut donner de la valeur à la vérité, et la vérité, c’est les médias sérieux qui l’incarnent.

Que pensez-vous des initiatives prises par Facebook et Google pour lutter contre les fake news ?

M.L.S.C. C’est très bien, mais je me demande si ce qu’on attend d’eux relève juste leur intelligence morale, ou si nous pouvons prendre d’autres mesures. Je pense que c’est mieux si la pression vient de tout le monde. C’est pourquoi il faut encourager la constitution d’un écosystème concurrentiel vivant. Ce serait inquiétant si Pinterest ou Snapchat était racheté par Google, Facebook ou même Apple. C’est aussi ennuyeux qu’il n’y ait pas de concurrent européen ; c’est dans cette logique qu’Axel Springer [actionnaire du groupe Aufeminin, ndlr] a investi dans le moteur de recherche Qwant. C’est important pour la démocratie.

Quelles sont les ambitions du groupe Aufeminin pour 2017 ?

M.L.S.C. L’un des principaux enjeux sera de monétiser notre audience sociale. Aufeminin est le leader de l’engagement sur Facebook en France, avec plus de 10 millions d’interactions en février, un reach total de 60 millions, plus de 10 millions de lecteurs par mois sur Pinterest… Malgré la taille de notre audience sociale, sa capacité contributive est très faible. Il va falloir que Google et Facebook deviennent plus partageux. Plusieurs possibilités de monétisation s’offrent à nous sur les réseaux sociaux : Instant articles, la vidéo, les contenus de marque… Nous testons aussi Instant experience, qui permet aux utilisateurs d’acheter directement depuis Facebook. Le champ de monétisation sur le social est énorme.

Quels sont vos autres axes de développement ?

M.L.S.C. Le programmatique et le transactionnel représentent plus de 55% de notre chiffre d’affaires [107 millions d’euros en 2016, 24,7 millions d’Ebitda] et c’est l’élément central de notre stratégie. Nous cherchons aussi toujours à créer de nouvelles sources de revenus. C’est dans cette logique que nous lançons des verticales très pointues sur Facebook, par exemple sur le body positive, les cheveux, l’anti-détox… Ca nous permet de segmenter notre audience et ainsi d’aller chercher de l’affinité. Nous avons aussi beaucoup d’ambitions sur Snapchat.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.