Télévision
La télévision se délure toujours plus. Selon Eurodata TV, qui a analysé les nouveaux programmes mondiaux, la tendance est à la prise de pouvoir, au politiquement incorrect. Il s’agit de faire bouger les lignes, même géographiques.

Un petit garçon qui se sent profondément fille. Une jeune femme qui intègre le milieu très macho du base-ball américain. Une chaîne qui aide financièrement des sans-abris pour qu'ils s'en sortent… En 2016, la télévision a tenté de faire bouger les lignes. Selon Eurodata TV Worldwide, structure internationale de Médiamétrie qui étudie les nouvelles tendances de programmes télévisés dans le monde, «le curseur se déplace». «On touche désormais à d’autres sujets, pour le divertissement, mais aussi pour les tous les genres de contenus», affirme Sahar Baghery, directrice du pôle études et stratégies des contenus.

Les tabous audiovisuels s’ouvrent à tous les genres: le documentaire avec le britannique Kids on the Edge (Channel 4), qui suit des enfants en crise d’identité, la fiction avec la série américaine Pitch (20th Century Fox) dont l’héroïne est la première femme à entrer dans le monde du base-ball professionnel, la télé-réalité avec l'émission néerlandaise The Amsterdam Project (RTL4) où la chaîne suit durant un mois des sans-abris à qui l’on a donné 10 000 euros pour s’en sortir.

«Cette prise de pouvoir, cette manière de pouvoir s’exprimer et affirmer qui on est, se baptise l’empowerment, explique Sahar Baghery. On voit beaucoup de contenus donnant de la visibilité à des communautés souhaitant avoir les moyens d’agir au même rang que les autres.»

Les temporalités s'entremêlent

Eurodata TV note aussi un mouvement dans les lignes de la narration. Il y a de moins en moins de démarcation entre la fiction, la réalité et l’entertainment. «Les temporalités s’entremêlent», note la spécialiste. Elle cite en exemple la série uchronique Mars (Nat Geo) qui utilise les codes narratifs empruntés à la fiction ainsi que des effets visuels où se mélangent des interviews de scientifiques et de chercheurs pour raconter la conquête de Mars en 2033.

Le docu-réalité britannique Six Wives with Lucy Worsley (BBC) investit, de son côté, le récit historique avec une narratrice qui alterne ses récits entre les périodes et intègre même, comme personnage secondaire, les scènes historiques reconstituées, où elle s’adresse au téléspectateur en aparté.

Le politiquement incorrect s’invite aussi sur le petit écran qui, désormais, parle de sexe directement, sans tabou, comme dans So kommt Deutschland (Sixx) qui part à la recherche de couples s’étant parfaitement trouvés sexuellement. Aux Etats-Unis, Come to bed, suit cinq couples dans leur lit… avant que les lumières ne s’éteignent. Ce sont les conversations intimes qui sont traquées par le programme.

Enfin, le voyage et le soleil reviennent à la télévision. «De l’exotique noir on passe maintenant au traveltainment: partir loin pour découvrir le monde et d’autres cultures, reconstruire sa vie, se recentrer sur ce qui compte vraiment», commente Sahar Baghery. Better late than never (NBC) suit quatre célébrités américaines (qui a priori ne sont guère sorties des Etats-Unis…) en vadrouille dans le Sud-Est asiatique. Le docu-réalité anglais The Retreat (BBC) emmène en retraite spirituelle une poignée de candidats à une vie plus saine et spirituelle. C’est vrai aussi que les paysages paradisiaques du sud de la Thaïlande aident beaucoup à cela.

 

 

La France 3e exportateur mondial de programme TV

Eurodata TV a comptabilisé 8 350 nouveaux programmes en 2016, dont plus de la moitié (53%) sont des créations originales, c’est-à-dire des productions locales. Ce sont des chiffres stables par rapport à 2015. La fiction, avec 40% du volume de ces nouveaux programmes, est le genre le plus important, au même niveau que le «factuel», c’est-à-dire les magazines, talk-shows ou téléréalités. Les 20% restants sont des programmes de divertissement, un genre qui gagne 3 points par rapport à 2015. Les Américains restent les champions de l’export avec plus de 1350 émissions vendues hors de leurs frontières, devant les britanniques (plus de mille)… et les Français. Les producteurs nationaux sont cependant loin derrière avec seulement 150 programmes exportés.  

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