Digital
Le Medef organisait les 10 et 11 juin la première Université du numérique afin de réfléchir à la construction de l’Europe digitale.

Le numérique, qui contribue pour 110 milliard d’euros à la richesse nationale, est «l'un des sept piliers de la croissance», selon Pierre Gattaz, président du Medef, qui organisait les 10 et 11 juin son Université du numérique. Pourtant, dans l’Hexagone et en Europe en général, la révolution numérique a pris un temps de retard sur les Etats-Unis.

Les entreprises ont du mal à trouver leur place dans un monde largement dominé par les Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon). «Force est de constater que nos entreprises sont en retard dans l'utilisation et l'appropriation du numérique, ce n'est une priorité que pour 8% d'entre elles», souligne le président du mouvement patronal. Une étude McKinsey, intitulée «Accélérer la mutation numérique des entreprises: un gisement de croissance et de compétitivité pour la France», affirme que le pays est au 22e rang européen en matière de développement digital.

Totalisant 5,5% du PIB en 2015, le numérique prend à sa charge le quart de la croissance française, toujours selon le rapport du cabinet. Il devrait atteindre 7% en 2020, soit 180 milliards d'euros. Reste à déterminer des règles équitables de concurrence.

Une même analyse des participants

L'université du Medef a vu tous les protagonistes s’accorder sur les idées, règles et constats qui empêchent l'économie numérique de décoller. Comme le remarque lui-même Carlo d’Asaro Biondo, président EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique) de Google, la première donnée à prendre en compte est celle de l’audience: «Il ne faut pas oublier la différence entre l’Europe et les Etats-Unis. Dans l’Union européenne, il faut composer avec 28 pays, 32 langues et quasiment autant de législations concernant les lois numériques, contre une seule en vigueur aux Etats-Unis.»

De son côté, Denis Olivennes, président du directoire de Lagardère Active, constate qu'«il est impossible de se développer sans collaborer entre les pays». Il estime que «les règles imposées actuellement nuisent au développement de l’économie numérique française», alors que d'autres sont «nécessaires et  doivent garantir une bonne collaboration entre les pays».

Enfin, Yves Tyrode, directeur digital et communication de la SNCF, soulève le problème du référencement sur Google, moteur de recherche qui a 92% de part de marché en Europe: «Impossible pour le site français Voyages-SNCF.com d’être en tête des sites de réservations d’hôtel quand Booking.com débourse 2 milliards d’euros chaque année pour être en tête des pages Google.» Une neutralité du Net pas vraiment respectée et qui reste au cœur de ce débat.

Nécessaire harmonisation européenne

La quantité de données diffusées sur internet est quasiment incalculable. Parmi elles, un grand nombre d’œuvres sans respect du droit d'auteur. Qu'elles soient musicales ou cinématographiques, elles sont accessibles partout dans le monde, sur des plateformes légales comme You Tube, Deezer ou les sites de VOD, mais aussi sur des sites pirates.

Toute personne peut donc télécharger le contenu qu’elle souhaite légalement, mais aussi (et souvent) illégalement. Un manque à gagner d'importance pour les ayants droit et les diffuseurs. Les intervenants tiraient d’ailleurs le signal d’alarme à ce propos, sans avoir pour autant de solution miracle. Le commissaire européen à l'Economie numérique, Günther Oettinger, annonce la mise en place «d'une seule réglementation» et d'un «droit d'auteur européen» afin d'éviter que les Gafa ne choisissent, pour s'implanter, les pays d'Europe où la protection des données est la plus faible.

Pour Didier Mama, vice-président EMEA de Sales Cloud, «une harmonisation entre les pays européens est nécessaire pour combattre de front ce fléau.» Mais l'homme reste irremplaçable devant les robots: «Dans un monde où le business model évolue constamment, il faut faire travailler sa matière grise. L’ordinateur, l’électronique peuvent être une aide, mais ils ne pourront jamais nous remplacer.» Enfin, il estime que «l’Europe du numérique n’a pas besoin de se baser forcément sur le modèle des entreprises de la Silicon Valley. Pour autant, elle doit connaître les besoins et les envies de ses clients afin de proposer des services utiles au plus grand nombre.»

Un virage numérique que les Gafa ont merveilleusement bien négocié. Mais nous ne sommes qu’au début de cette révolution, qu’il va falloir dompter. Il y a encore quinze ans, les leaders du téléphone étaient européens, à l'instar de Nokia... 

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