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Évoluant dans le secteur compliqué de la charcuterie, Fleury Michon veut reconquérir les consommateurs par le front de la filière porcine.

Fleury Michon met ses consommateurs, disons-le vite, au fact checking. Après avoir embarqué une poignée de curieux sur des bateaux de pêche en Alaska en 2014, afin de «vérifier que le surimi était bien fait avec du poisson», l’industriel les invite cette fois à la rencontre d’éleveurs de la filière porcine J’aime le jambon, qu’il a lui-même contribué à mettre sur pied, autour de deux promesses: des animaux nourris et élevés sans OGM et sans antibiotiques. Un film de 25 secondes («Venez vérifier, la suite»), réalisé par DDB Paris, met en scène depuis le 12 mai trois éleveurs assez maladroits avec la caméra. Le discours se veut authentique. Des consommateurs tirés au sort les rencontreront au mois de juin.

Contexte difficile

Car ces consommateurs, ils ont plutôt tendance à bouder la viande et en particulier la viande transformée. Les ventes ont reculé de 0,5% en 2016, selon la Fédération française des industriels charcutiers traiteurs (Fict), confirmant la tendance de l’année précédente.

Après la parution d’une étude de l’Organisation mondiale de la santé en octobre 2015 qui rangeait la viande transformée dans la liste des agents «cancérogènes pour l'homme», les ventes avaient même décroché de 4,9% sur un an, révélait le cabinet Nielsen. Autant de chiffres qui ont pu faire réfléchir un Fleury Michon dont 60% du chiffre d’affaires provient de la charcuterie – et les 40% restants des plats transformés… dont l’image avait souffert des lasagnes au cheval de Findus, ce qui avait mené Fleury Michon à la campagne «Enfin des plats cuisinés qui ressemblent à la photo». En 2016, les ventes du groupe français avaient baissé de 2,6% sur un an, à 738 millions d'euros, reflétant les difficultés du secteur. 

Engagement de long terme

David Garbous, directeur du marketing stratégique de Fleury Michon, réfute l’idée que la marque agisse en réaction avec sa campagne autour du porc, soulignant que l'entreprise «a participé à la création du Label rouge dans les années 1970», ou qu’elle «propose des produits bio depuis 2004».

La réalité est que le mode de consommation actuel n’est pas pérenne sur le long terme pour les consommateurs, les ressources naturelles et, donc, Fleury Michon. David Garbous abonde: «Notre particularité est d’avoir un actionnariat familial, qui nous demande à travailler à la pérennité du groupe et donc de changer de façon radicale la proposition de valeur. Nous avons la fantastique mission d’organiser les conditions d’un basculement vers une alimentation différente.»

La filière J’aime ne concerne à ce jour que 3% des volumes produits par Fleury Michon. L’ambition est d’atteindre 20% en 2020. Mais aussi d'appeler professionnels, associations et élus à discuter pour la renforcer.

Côté élevage, l’industriel affirme être en contact avec CIWF France, une ONG qui «promeut des pratiques d’élevage respectueuses du bien-être animal et œuvre pour des alternatives à l’élevage industriel». Côté abattage, Fleury Michon est en relation avec l’association Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA), afin de tenter d'agir sur ce front aussi.

Effort de communication

Ces actions disent une chose: à trop raconter d’histoires à coups de storytelling, les industriels de l’agroalimentaire peinent à être audibles, un peu comme Pierre qui criait au loup. «Afin de combattre cela, explique David Garbous, nous ne devons pas être dans une posture déclaratoire mais raconter la vraie histoire, et pas que la belle histoire.»

Plusieurs améliorations se présentent devant Fleury Michon, selon lui: «Des audits réguliers des abattoirs, avec lesquels on avait peu de liens, et une offre bio mieux marquetée, car nous étions face à un déficit de l’offre, avec des produits surtout destinés aux bobos.» Et tout cela, il faudra bien sûr le communiquer afin de combler l’écart constaté entre la performance commerciale de la marque, et une présence à l’esprit jugée encore insuffisante. 

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