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Avant son procès le 22 juin, l’application de «ride sharing» principalement utilisée par les jeunes lance un film digital détournant des extraits d’interventions de politiques quand ils étaient jeunes, prenant ainsi la défense du service.

«Nous les jeunes». Nicolas Sarkozy, cheveux longs, fait sa première télévision en 1975. Il a 20 ans. C’est avec cette archive que débute le film viral de Heetch , l’application française de “ride sharing” (partage de voiture) qui met en relation des particuliers et des chauffeurs amateurs et dont le procès s’ouvrira le 22 juin au tribunal correctionnel de Paris pour «complicité d'exercice illégal de la profession de taxi». Sur le même modèle, Uber Pop a été interdit en France en septembre 2015, le transport entre particuliers à titre payant étant illégal à l’exception du partage de frais (modèle du covoiturage) dont la définition est vague. 
Sur le banc des accusés, les trentenaires Teddy Pellerin et Mathieu Jacob, diplômés de Supelec, et Aylic Petit, sorti de L'Epitech, qui ont lancé en septembre 2013 cette appli ouverte de 20 heures à 6 heures pour permettre aux jeunes fêtards de trouver un véhicule en fin de soirée. La start-up (25 salariés) présente à Paris, Lille et Lyon, revendique 300 000 utilisateurs (80% ont moins de 25 ans) et 50 000 courses hebdomadaires sur lesquelles elle prélève une commission de 15% pour un tarif moyen à 10 euros qu’elle défend comme «du partage de frais». Elle a plafonné les gains des conducteurs à 6000 euros par an, preuve que ce n'est pas une activité professionnelle. Pour sauver son avenir, la start-up, lancée à Varsovie et Stockholm, qui a déjà levé 1 million d’euros pour son développement européen, a fait appel à Buzzman pour lancer une campagne de sensibiliation au «ton engagé et provocateur». La vidéo intitulée «s’ils étaient encore jeunes, ils se battraient pour Heetch», diffusée sur les réseaux sociaux, détourne des extraits d’interventions de politiques, quand ils étaient jeunes, prenant ainsi la défense du service. On voit défiler Sarkozy, Hollande, Hortefeux, Boutin, Montebourg, Segolène Royal dans une parodie qui vise à les interpeller. «À un mois du procès, ce film est un outil de lobbying viral pour faire revenir le débat de l'économie de partage dans les médias et pour mobiliser les jeunes défenseurs de Heetch», explique Georges Mohammed-Chérif, président de Buzzman.

«Nous les jeunes»

«Quand j’ai trouvé les extraits où Nicolas Sarkozy dit “nous les jeunes” et “faut-il mourir en respectant les règles, ou bafouer les règles et continuer à vivre” qui fait la chute, j’ai su que nous pouvions faire le film», raconte Justin Le Métay, fondateur de la société de production L’affreux bonhomme, chargé par Romain Pergeaux, créatif senior chez Buzzman, de trouver les archives. Ce dernier, transfuge de BETC arrivé en janvier, est le concepteur du formulaire d’abonnement interactif de Canal+ (avec Catherine et Liliane) multirécompensé. «J’avais écrit une première trame que nous avons modifiée en fonction des phrases trouvées», dit-il. «Partant de plus de cinq heures de rush, nous avons travaillé sur un "ours", un pré-montage de six minutes pendant trois jours pour arriver au montage cut final de 45 secondes», ajoute Justin Le Métay. La question des droits a été posée mais, pour le moment, Heetch n’y a pas répondu... concentrée sur la mobilisation autour de son procès. «En trois jours, le film a rassemblé 1 million de vues sur Facebook et plus de 10 000 partages et a fait l’objet d’articles dans plusieurs magazines, note Teddy Pellerin. Mais pas encore de reprises dans la presse quotidienne nationale et les JT des grandes chaînes.»

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