Malgré les nombreuses campagnes en faveur d’une plus grande diversité, le secteur du numérique peine toujours à attirer les femmes. Pour y remédier, l’agence LoopIn et l’opérateur Orange ont décidé de relancer leur programme d’accélération dédié aux créatrices de contenu multiplateformes, Bet Her. Durant une semaine, agences, annonceurs et créatrices de contenu unissent leur force pour donner plus de visibilité à la parité. Stratégies était sur place.

Au coeur du siège social de l'opérateur Orange a eu lieu la seconde édition de Bet Her, un programme d’accélération dédié aux créatrices de contenu. Le temps d’une semaine, dix créatrices de contenu triées sur le volet se sont rassemblées autour de la table afin d’avoir en leur possession toutes les clés pour se lancer dans le grand bain de l’influence et ainsi se professionnaliser. Elles viennent de France, de Belgique et de Suisse, traitent de sujets totalement différents et sont actives sur au moins deux plateformes vidéo. Pour l’occasion, Stratégies s’est rendu au deuxième jour de cette semaine intensive. Et dès le début, la couleur est donnée : « Aujourd’hui, ce sera le jour le plus dense en termes d’informations. » En témoignent les quatre cours prévus. À 10 heures arrive la première intervenante, la journaliste et créatrice de contenus Mymy Haegel, qui entame son cours avec une question ouverte : « Comment se marketer ? » En une heure, les conseils s’enchaînent : « Créer sa propre ligne éditoriale, c’est comme une personnalité, tout le monde en a une », « Attention aux termes trop inclusifs car peut être excluant ! », « Il ne faut pas non plus perdre de vue ses convictions. » Pas de quoi effrayer les participantes venues de leur plein gré. « Parmi tous les cours, on pioche les informations et les formations qui nous intéressent. C’est plus pertinent pour nous de voir des gens qui viennent du secteur de l’influence pour nous faire part de leur expérience et ça nous permet par la même occasion de découvrir des milieux qu’on n’aurait pas forcément regardés et des nouveaux comptes », témoigne une des participantes au programme, Coralie, créatrice des comptes Instagram et TikTok @Bycoraliee.

Seulement 8% de youtubeuses

À l’origine de ce projet, Nawal Stouli, fondatrice de l’agence d’influence LoopIn ; Marie Camier Théron, fondatrice de la société de production Ume Agency et de l’association Les Internettes et Stéphanie Duvoux, directrice influence digital chez Orange. Trois femmes qui se sont mobilisées pour rendre accessible et inclusive la représentation dans le secteur de la création. Avec un constat en tête : seules 8% des vidéos sur YouTube sont réalisées par des femmes, selon un rapport du Haut Conseil à l’Égalité. « En réalité, c’est venu de plusieurs constats. J’ai été créatrice de contenu où j’ai observé ce manque de diversité, puis en tant que fondatrice d’agence d’influence je me suis rendue compte que je représentais moins de femmes que d’hommes, explique Nawal Stouli. Les femmes sur les réseaux sont moins structurées en termes de financement et se retrouvent parfois dans des situations économiques critiques. Et puis mon agence d’influence a elle-même été incubée alors je me suis demandée comment rendre la pareille. » Son expertise du milieu de l’influence en poche, elle décide de s’associer avec Marie Camier Théron et à son large carnet d’adresses. Une fois l’idée du projet validé, encore faut-il trouver des financements. « Je cherchais des sponsors pour nous rémunérer et rémunérer les créatrices de contenus. Je suis allée voir Orange il y a deux ans, ils ont tout de suite accepté à la condition d’être les seuls sur le sujet. Je connaissais leur éthique et leurs valeurs correspondaient en tout point à notre volonté », indique la fondatrice de l’agence LoopIn. « La thématique de la parité fait partie des valeurs défendues par Orange. En 2023, les femmes chez Orange représentaient 21% des métiers techniques et du numérique (innovation et technologies), notre objectif pour 2025 est de passer à 25% », répond la directrice influence digital d’Orange, Stéphanie Duvoux.

En contrepartie de son aide financière, le géant des télécoms expose auprès des participantes ses engagements en faveur des femmes, de l’IA et de la cybersécurité dans un cours de deux heures. À l’issue de cette semaine, les participantes décrocheront automatiquement un contrat de 2000 euros avec Orange qui leur offre carte blanche pour produire sur ses réseaux sociaux Instagram, X et TikTok une courte vidéo de décryptage axée sur les expertises autour des métiers techniques et numériques. « L’idée est qu’elles s’imprègnent de l’univers d’Orange pour pouvoir en parler derrière. Du point de vue de notre entreprise, cela nous permet aussi d’explorer des territoires sur lesquels nous n’étions pas ou peu », appuie Stéphanie Duvoux.

Un fonds d'aide pour les novices

À 11 heures c’est Cécile Delacoudre, chargée de mission pour le fonds d’aide à la création du CNC Talent, qui prend le relais et lance d’entrée de jeu : « Vous êtes toutes éligibles à l’aide à la création à hauteur de 30 000 euros. » Pour les novices, il s'agit d'un programme qui existe depuis sept ans et permet notamment à des créateurs de contenu de continuer à vivre de leur passion et/ou de se professionnaliser. Aujourd’hui, le fonds d’aide a accompagné plus de 700 créateurs et créatrices. Une de celles qui aurait sûrement pu en bénéficier est Calie, la co-productrice de la chaîne YouTube aux millions d'abonnés @NotaBene et fondatrice de feu la chaîne @LesTopovaures. De manière très transparente, elle raconte les aléas du métier en termes de rémunération, sur la création d’entreprise, le statut d’auteur… « Et surtout pensez à prendre un comptable qui s’y connaît sur le monde du digital », préconise-t-elle. « Je ne connaissais pas du tout ce programme, je me suis inscrite à la suite d’un mail envoyé par Bet Her. Il fallait envoyer une petite vidéo de présentation sur nous, notre travail et pourquoi nous voulions postuler », indique la créatrice Coralie. Une première sélection a ensuite été réalisée par l’agence LoopIn, en s’assurant à bien respecter une certaine diversité des profils et la mixité des contenus, pour laquelle Orange a eu un droit de regard. « C’est un public qu’il faut aller chercher de nous-mêmes car les femmes ont tendance à se diminuer. Malheureusement, nous n’avons pas encore de femmes spécialisées dans la création de contenu sur les sciences, c’est le seul bémol qu’on pourrait nous reprocher mais c’est aussi représentatif du milieu », regrette Marie Camier Théron. Un défi que les organisatrices s’engagent à relever pour l’année prochaine !

Les profils de l’édition 2024 

Selfie’storique - Histoire

Les EthnoChroniques - Anthropologie

Naledi Sô - Société

Ache_jv - Jeux Vidéo / Société

Bycoraliee - Architecture / Culture

Safya Fierce - Société

Chloe_Twitch / Stream_Her - Jeux vidéo

TataDrapi - Société / Rap

Terrapodia - Entomologie

ovairestherainbow - Société